Une expo enrichissante et stimulante que nous allons voir prochainement avec nos élèves au Botanique à Bruxelles.
29 septembre 2009
Controverses
Une expo enrichissante et stimulante que nous allons voir prochainement avec nos élèves au Botanique à Bruxelles.
25 septembre 2009
Rosencrantz et Guildenstern sont morts
De Tom STOPPARD, mise en scène de Daniel Scahaise.
Au Théâtre des Martyrs le 22 septembre (ARW) et le 1 octobre (ARU1) à 20h15.
Pour plus d'infos, un petit clic ici.
20 septembre 2009
Mise au vert
Doppler, Erlend LOE
Un retour à la nature dans la veine de Paasilinna.
Est-ce l’accident de vélo ? Est-ce la mort de son père ? La crise de la quarantaine ? Quoi qu’il en soit, Doppler a décidé de quitter la ville et ses contemporains, et plus particulièrement sa femme et ses deux enfants, pour aller vivre dans la forêt aux abords d’Oslo. Fuir les autres, car avant toute chose Doppler n’aime pas les gens. Leur vie minuscule de Norvégiens, leur « application », cette faculté innée de se conformer aux attentes et d’essayer de faire le mieux. Doppler est résolu : il ne veut plus être « appliqué ». Alors dans la forêt, il goûte à l’oisiveté et se donne pour programme de ne rien faire.
Il faut néanmoins subvenir à ses besoins vitaux. Alors il vole, parfois, ou tente de troquer au supermarché la viande de l’élan qu’il a tué de ses mains. Pas facile, d’ailleurs, de tuer un élan, surtout quand après il faut s’occuper d’un jeune élan orphelin. Qu’à cela ne tienne : Doppler n’a rien contre un compagnon, surtout si, comme Bongo le jeune élan, il est plutôt silencieux…
Parviendra-t-il à rester ainsi coupé du monde et à échapper à ses obligations ? Car, quand même, on rencontre parfois des personnes intéressantes qui, comme lui, vivent en marge de la société. Par exemple ce vieil homme qui passe sa vie à construire une reproduction en miniature d’une scène de la bataille des Ardennes où son père a trouvé la mort. Tiens ! En voilà une idée : rendre hommage à son père disparu. Doppler pourrait à son tour réaliser quelque chose : un totem !
Comme chez Arto PAASILINNA, le parcours décalé d’un personnage qui n’a rien d’héroïque est l’occasion de passer en revue les travers de la société, ici la classe moyenne norvégienne. L’éducation des enfants, l’absurdité du monde du travail, les sur-consommation, la propriété … C’est parfois un peu facile, mais souvent amusant. A partir de l’idée, pas très originale, du retour de l’homme à la nature et de la rupture avec la civilisation, Erlend LOE montre que le plus difficile n’est pas de s’adapter mais d’échapper aux autres qui, quoique vous fassiez, ne sont jamais bien loin.
(Niveau 2)
PS: Et la suite des aventures de Doppler, c'est ici.
Un retour à la nature dans la veine de Paasilinna.
Est-ce l’accident de vélo ? Est-ce la mort de son père ? La crise de la quarantaine ? Quoi qu’il en soit, Doppler a décidé de quitter la ville et ses contemporains, et plus particulièrement sa femme et ses deux enfants, pour aller vivre dans la forêt aux abords d’Oslo. Fuir les autres, car avant toute chose Doppler n’aime pas les gens. Leur vie minuscule de Norvégiens, leur « application », cette faculté innée de se conformer aux attentes et d’essayer de faire le mieux. Doppler est résolu : il ne veut plus être « appliqué ». Alors dans la forêt, il goûte à l’oisiveté et se donne pour programme de ne rien faire.
Il faut néanmoins subvenir à ses besoins vitaux. Alors il vole, parfois, ou tente de troquer au supermarché la viande de l’élan qu’il a tué de ses mains. Pas facile, d’ailleurs, de tuer un élan, surtout quand après il faut s’occuper d’un jeune élan orphelin. Qu’à cela ne tienne : Doppler n’a rien contre un compagnon, surtout si, comme Bongo le jeune élan, il est plutôt silencieux…
Parviendra-t-il à rester ainsi coupé du monde et à échapper à ses obligations ? Car, quand même, on rencontre parfois des personnes intéressantes qui, comme lui, vivent en marge de la société. Par exemple ce vieil homme qui passe sa vie à construire une reproduction en miniature d’une scène de la bataille des Ardennes où son père a trouvé la mort. Tiens ! En voilà une idée : rendre hommage à son père disparu. Doppler pourrait à son tour réaliser quelque chose : un totem !
Comme chez Arto PAASILINNA, le parcours décalé d’un personnage qui n’a rien d’héroïque est l’occasion de passer en revue les travers de la société, ici la classe moyenne norvégienne. L’éducation des enfants, l’absurdité du monde du travail, les sur-consommation, la propriété … C’est parfois un peu facile, mais souvent amusant. A partir de l’idée, pas très originale, du retour de l’homme à la nature et de la rupture avec la civilisation, Erlend LOE montre que le plus difficile n’est pas de s’adapter mais d’échapper aux autres qui, quoique vous fassiez, ne sont jamais bien loin.
(Niveau 2)
PS: Et la suite des aventures de Doppler, c'est ici.
16 septembre 2009
Ouvrez-moi la porte
Le Serrurier volant, Tonino BENACQUISTA
Un livre illustré pour adulte ou les périples d'un serrurier tourmenté.
Pourquoi les romans illustrés sont-ils réservés aux enfants. Pourquoi, nous, adultes et grands enfants (je pense à nos chers élèves…), ne pouvons-nous allier plaisir de la narration à celui de l’illustration, découvrir la suite d’une histoire par les mots ou par le dessin qui l’accompagne, enrichir le récit que l’on lit par les détails que l’on voit ? Il n’y a aucune raison, semblent répondre les éditeurs belges (un peu de nationalisme, faisons découvrir à nos lecteurs français un peu de notre patrimoine culturel, et promettons-leur d’ailleurs de publier tout bientôt un article spécial littérature belge) des éditions Estuaire qui ont eu la brillante idée de sortir des Carnets Littéraires, dont le principe est de faire collaborer un auteur avec un illustrateur. Ce n’est pas de la bande-dessinée, ni de la littérature jeunesse, mais bien de la littérature illustrée pour adulte. Comme une bonne idée ne vient jamais seule, les éditeurs ont pensé à Tonino BENACQUISTA pour écrire l’un des ouvrages de cette collection. BENACQUISTA, auteur prolifique, a écrit de nombreux romans, dont les très remarquables Saga, Quelqu’un d’autre et Malavita et est aussi scénariste (il a co-scénarisé avec Jacques Audiard les extraordinaires films Sur mes lèvres et De battre mon cœur s’est arrêté dont je me retiens avec difficulté de vous parler beaucoup plus longuement). Par ailleurs, il a également travaillé avec la bande dessinée puisqu’il a écrit l’adaptation d’une de ses nouvelles, La boîte noire, et un scénario original, L’outremangeur (qui a eu droit malheureusement à une maladroite adaptation au cinéma), tous deux illustrés par FERNANDEZ. Rien de surprenant donc à ce qu’on ait pensé à lui. Lorsqu’on lui a parlé du projet, BENACQUISTA a évoqué timidement le nom de TARDI, sans oser rêver que ce dernier accepte. Or, non seulement TARDI accepta de participer à l’un des carnets, mais sans savoir que BENACQUISTA avait pensé à lui, il proposa précisément le nom de cet auteur, avec qui il avait envie de collaborer depuis longtemps. Le hasard fait bien les choses. Sauf que ce n’est pas tout à fait le hasard. En effet, ces deux hommes ont bien des points communs : artistes populaires (au sens le plus élogieux du terme) ne se pliant jamais à aucun diktat de la mode culturelle, touches à tout (et avec brio), ils créent ou adaptent de vraies bonnes histoires, avec des personnages sombres mais franchement humains, des camarades terriblement attachants. De plus, tous deux ont un gros faible pour le polar (BENACQUISTA en a écrit de nombreux, TARDI a créé l’enquêteuse Adèle Blanc-Sec et adapté de nombreux Nestor Burma, le détective créé par Léo MALLET). Enfin, ils assument l’un et l’autre une culture populaire (BENACQUISTA dit que sa vocation d’artiste lui vient de la télévision) et n’en sont pas moins de vrais amateurs de littérature (TARDI a adapté, entre autres, des œuvres de CELINE). Ils étaient donc faits pour se rencontrer. De leur collaboration est né Le Serrurier volant : l’histoire de Marc qui, pour oublier la tragédie qu’il a vécue, quitte tout et se reconvertit en serrurier indépendant. Il ferme la porte de sa vie pour ouvrir celle des autres mais certaines serrures vont lui ouvrir des fenêtres sur le passé et lui permettre de penser à l’avenir. Une belle petite histoire, un conte moderne, bien écrit, bien ficelé, mis en valeur par les illustrations de TARDI qui représentent parfaitement l’ambiance décrite par BENACQUISTA. Deux art(tiste)s pour le prix d’un, double plaisir.
PS: il semblerait que les éditions Estuaire aient arrêté cette série, mais le volume BENACQUISTA-TARDI est disponible en Folio.
(Niveau 1)
Un livre illustré pour adulte ou les périples d'un serrurier tourmenté.
Pourquoi les romans illustrés sont-ils réservés aux enfants. Pourquoi, nous, adultes et grands enfants (je pense à nos chers élèves…), ne pouvons-nous allier plaisir de la narration à celui de l’illustration, découvrir la suite d’une histoire par les mots ou par le dessin qui l’accompagne, enrichir le récit que l’on lit par les détails que l’on voit ? Il n’y a aucune raison, semblent répondre les éditeurs belges (un peu de nationalisme, faisons découvrir à nos lecteurs français un peu de notre patrimoine culturel, et promettons-leur d’ailleurs de publier tout bientôt un article spécial littérature belge) des éditions Estuaire qui ont eu la brillante idée de sortir des Carnets Littéraires, dont le principe est de faire collaborer un auteur avec un illustrateur. Ce n’est pas de la bande-dessinée, ni de la littérature jeunesse, mais bien de la littérature illustrée pour adulte. Comme une bonne idée ne vient jamais seule, les éditeurs ont pensé à Tonino BENACQUISTA pour écrire l’un des ouvrages de cette collection. BENACQUISTA, auteur prolifique, a écrit de nombreux romans, dont les très remarquables Saga, Quelqu’un d’autre et Malavita et est aussi scénariste (il a co-scénarisé avec Jacques Audiard les extraordinaires films Sur mes lèvres et De battre mon cœur s’est arrêté dont je me retiens avec difficulté de vous parler beaucoup plus longuement). Par ailleurs, il a également travaillé avec la bande dessinée puisqu’il a écrit l’adaptation d’une de ses nouvelles, La boîte noire, et un scénario original, L’outremangeur (qui a eu droit malheureusement à une maladroite adaptation au cinéma), tous deux illustrés par FERNANDEZ. Rien de surprenant donc à ce qu’on ait pensé à lui. Lorsqu’on lui a parlé du projet, BENACQUISTA a évoqué timidement le nom de TARDI, sans oser rêver que ce dernier accepte. Or, non seulement TARDI accepta de participer à l’un des carnets, mais sans savoir que BENACQUISTA avait pensé à lui, il proposa précisément le nom de cet auteur, avec qui il avait envie de collaborer depuis longtemps. Le hasard fait bien les choses. Sauf que ce n’est pas tout à fait le hasard. En effet, ces deux hommes ont bien des points communs : artistes populaires (au sens le plus élogieux du terme) ne se pliant jamais à aucun diktat de la mode culturelle, touches à tout (et avec brio), ils créent ou adaptent de vraies bonnes histoires, avec des personnages sombres mais franchement humains, des camarades terriblement attachants. De plus, tous deux ont un gros faible pour le polar (BENACQUISTA en a écrit de nombreux, TARDI a créé l’enquêteuse Adèle Blanc-Sec et adapté de nombreux Nestor Burma, le détective créé par Léo MALLET). Enfin, ils assument l’un et l’autre une culture populaire (BENACQUISTA dit que sa vocation d’artiste lui vient de la télévision) et n’en sont pas moins de vrais amateurs de littérature (TARDI a adapté, entre autres, des œuvres de CELINE). Ils étaient donc faits pour se rencontrer. De leur collaboration est né Le Serrurier volant : l’histoire de Marc qui, pour oublier la tragédie qu’il a vécue, quitte tout et se reconvertit en serrurier indépendant. Il ferme la porte de sa vie pour ouvrir celle des autres mais certaines serrures vont lui ouvrir des fenêtres sur le passé et lui permettre de penser à l’avenir. Une belle petite histoire, un conte moderne, bien écrit, bien ficelé, mis en valeur par les illustrations de TARDI qui représentent parfaitement l’ambiance décrite par BENACQUISTA. Deux art(tiste)s pour le prix d’un, double plaisir.
PS: il semblerait que les éditions Estuaire aient arrêté cette série, mais le volume BENACQUISTA-TARDI est disponible en Folio.
(Niveau 1)
10 septembre 2009
La part manquante
Les Disparus, Daniel MENDELSOHN
Une enquête sur la part manquante d’une histoire familiale. Une autre manière de parler de l’Holocauste, de l’Histoire et des histoires.
Daniel MENDELSOHN a été, depuis l’enfance, bercé par les histoires de son grand-père maternel : son départ d’une petite ville de Pologne en 1941, son arrivée aux Etats-Unis, … . Des histoires mythiques, répétées sans cesse. Des histoires drôles, souvent. Mais l’histoire qui concerne Schmiel, le frère du grand-père, et ses quatre filles, disparus en Pologne durant l’Holocauste, est une histoire incomplète dont le grand-père n’a jamais donné les détails. Où ? Quand ? Comment sont-ils morts ?
Après le décès de son grand-père, Daniel MENDELSOHN découvre les lettres désespérées de Schmiel, implorant sa famille américaine de l’aider à quitter la Pologne car le pire risquait d’arriver.
L’auteur, passionné par la généalogie, décide d’entreprendre des recherches pour comprendre ce qui est arrivé à ce grand-oncle et à sa famille. Ces recherches vont l’amener à voyager : Israël, Australie, Suède, Ukraine (là où se trouve aujourd’hui Bolechow, la ville dont sa famille est originaire) … Chaque voyage est une rencontre avec les anciens de Bolechow, rares survivants de l’extermination de la population juive de la région, programmée en plusieurs phases par les nazis. A chaque rencontre, de nouvelles informations sur les disparus. Pas uniquement sur leur mort, mais des détails sur leur vie, leur quotidien, leur caractère, … Et aussi le portrait de ceux qui ont survécu et qui, chacun à leur manière, vivent avec le passé. Des rencontres, des voyages, mais aussi d’incroyables hasards qui, jusqu’à la toute fin, permettent à Daniel MENDELSOHN de reconstituer le puzzle.
Un livre sur la tragédie de l’Holocauste mais aussi une réflexion sur comment l’histoire se raconte, se construit et se transmet. De l’importance de dire, ou de ne pas dire. De la difficulté de juger ou de ne pas juger ce que l’on n’a pas vécu. MENDELSOHN s’interroge aussi sur les raisons de sa quête et sur ses propres liens familiaux.
L’histoire de la recherche des Disparus est entrecoupée par des réflexions sur les premiers épisodes de la Torah : la Genèse, Adam et Eve, Caïn et Abel, Noé, Abraham. Il compare, en historien et en spécialiste de la littérature grecque, les différentes interprétations données à ces autres histoires et montre comment elles peuvent nous éclairer sur nos comportements.
Dans ce livre, pas de scoops, par de révélations sensationnelles, mais le récit d’une recherche qui permet de mettre en lumière une autre réalité de l’Holocauste en passant non pas par le collectif, comme dans les lieux de mémoire que sont les camps, mais par le parcours de quelques individus. MENDELSOHN est parfois très sentimental, il le dit lui-même, mais son regard est surtout profondément humain et les questions qu’il évoque dépassent largement son histoire personnelle. Alors oui, c’est très long, très détaillé, mais c’est une lecture assez simple et souvent captivante (sans être pour autant, comme l’indique assez bêtement le quatrième de couverture, « un roman policier haletant » !).
Niveau 3
(Merci à Laurent pour ce conseil judicieux)
Une enquête sur la part manquante d’une histoire familiale. Une autre manière de parler de l’Holocauste, de l’Histoire et des histoires.
Daniel MENDELSOHN a été, depuis l’enfance, bercé par les histoires de son grand-père maternel : son départ d’une petite ville de Pologne en 1941, son arrivée aux Etats-Unis, … . Des histoires mythiques, répétées sans cesse. Des histoires drôles, souvent. Mais l’histoire qui concerne Schmiel, le frère du grand-père, et ses quatre filles, disparus en Pologne durant l’Holocauste, est une histoire incomplète dont le grand-père n’a jamais donné les détails. Où ? Quand ? Comment sont-ils morts ?
Après le décès de son grand-père, Daniel MENDELSOHN découvre les lettres désespérées de Schmiel, implorant sa famille américaine de l’aider à quitter la Pologne car le pire risquait d’arriver.
L’auteur, passionné par la généalogie, décide d’entreprendre des recherches pour comprendre ce qui est arrivé à ce grand-oncle et à sa famille. Ces recherches vont l’amener à voyager : Israël, Australie, Suède, Ukraine (là où se trouve aujourd’hui Bolechow, la ville dont sa famille est originaire) … Chaque voyage est une rencontre avec les anciens de Bolechow, rares survivants de l’extermination de la population juive de la région, programmée en plusieurs phases par les nazis. A chaque rencontre, de nouvelles informations sur les disparus. Pas uniquement sur leur mort, mais des détails sur leur vie, leur quotidien, leur caractère, … Et aussi le portrait de ceux qui ont survécu et qui, chacun à leur manière, vivent avec le passé. Des rencontres, des voyages, mais aussi d’incroyables hasards qui, jusqu’à la toute fin, permettent à Daniel MENDELSOHN de reconstituer le puzzle.
Un livre sur la tragédie de l’Holocauste mais aussi une réflexion sur comment l’histoire se raconte, se construit et se transmet. De l’importance de dire, ou de ne pas dire. De la difficulté de juger ou de ne pas juger ce que l’on n’a pas vécu. MENDELSOHN s’interroge aussi sur les raisons de sa quête et sur ses propres liens familiaux.
L’histoire de la recherche des Disparus est entrecoupée par des réflexions sur les premiers épisodes de la Torah : la Genèse, Adam et Eve, Caïn et Abel, Noé, Abraham. Il compare, en historien et en spécialiste de la littérature grecque, les différentes interprétations données à ces autres histoires et montre comment elles peuvent nous éclairer sur nos comportements.
Dans ce livre, pas de scoops, par de révélations sensationnelles, mais le récit d’une recherche qui permet de mettre en lumière une autre réalité de l’Holocauste en passant non pas par le collectif, comme dans les lieux de mémoire que sont les camps, mais par le parcours de quelques individus. MENDELSOHN est parfois très sentimental, il le dit lui-même, mais son regard est surtout profondément humain et les questions qu’il évoque dépassent largement son histoire personnelle. Alors oui, c’est très long, très détaillé, mais c’est une lecture assez simple et souvent captivante (sans être pour autant, comme l’indique assez bêtement le quatrième de couverture, « un roman policier haletant » !).
Niveau 3
(Merci à Laurent pour ce conseil judicieux)
3 septembre 2009
Femme à tout faire
La servante écarlate, Margaret ATWOOD
Un roman d’anticipation féministe et étonnant.
Pour la petite histoire, nous cherchions un roman d’anticipation à analyser en classe, dans la veine de 1984 de George ORWELL (que nous avons souvent fait lire à nos élèves). Amandine, qui a toujours le flair, nous a trouvé ce roman d’un écrivain dont nous pensions déjà beaucoup de bien (beaucoup de bien ici et ici). Et ça se confirme.
Donc nous sommes dans le futur, à la fin du vingtième siècle (le livre a été écrit en 1985) et nous écoutons le récit de Defred, une jeune femme habillée de rouge et coiffée d’un voile qui la cache aux regards des hommes. Elle est au service d’un Commandant et de son Epouse : elle est chez eux pour être fécondée. Depuis quelque temps, les naissances sont de plus en plus rares et les couples des classes dirigeantes peuvent avoir recours à ces mères porteuses à domicile, servantes silencieuses et désincarnées. Defred passe son temps à attendre et, par bribes, à penser à avant, au monde d’avant la République de Gilead. Elle était mariée à Luke, avait une petite fille. Mais où sont-ils maintenant ?
Est-il possible pour Defred de devenir cet objet de reproduction qui n’aurait pas de passé et pas d’avenir ? Est-il possible de faire à jamais disparaître le désir et ne limiter l’acte sexuel qu’à la reproduction ? Et comment la démocratie américaine a-t-elle pu en arriver là ?
C’est par petites touches qu’ATWOOD nous décrit la société de Defred, ses codes, son histoire et ses pratiques barbares. Elle imagine ici que la droite ultra-religieuse américaine s’empare du pouvoir, aidée en partie par certains mouvements féministes anti-pornographie. Le tout aboutit à la construction de cette femme-objet, mi-nonne mi-prostituée, soumise et contrôlée. On n’est pas loin de la société de 1984 à ceci prêt que chez ATWOOD ce ne serait pas les progrès technologiques qui permettraient l’instauration d’un régime totalitaire mais plutôt le fanatisme religieux.
Quand on sait combien le débat autour du retour du religieux et de l’effacement de certains principes de la laïcité est d’actualité (notamment la séparation de l’Eglise et de l’Etat), on se dit que La servante écarlate est une mise en garde puissante et pertinente. Le livre est parfois dur, certaines situations peuvent paraître malsaines, mais elles ne sont pas gratuites et servent à dénoncer une dérive et à questionner la place de la femme dans la société.
La force du livre réside également dans la finesse de sa construction et dans la justesse du ton : une distanciation entre le personnage et ce qui lui arrive. On est pris, captivé et tenu en haleine par ce roman qui pourtant se construit lentement. Et les dernières pages, d’une incroyable efficacité, nous amènent vers un autre niveau de lecture (mais nous n’en dirons pas plus…).
Pour terminer, une anecdote qui nous fait sourire, alors que nous nous apprêtons à faire lire ce roman à nos élèves : La servante écarlate a récemment donné lieu à une polémique au Canada. Un parent, dont l’enfant avait dû lire le roman à l’école, a estimé que cette lecture, qu’il considère comme trop brutale, anti-chrétienne et anti-islamique, n’était pas destinée à des adolescents.
Nous sommes déjà curieux de voir ce que nos élèves en penseront… Comme quoi — comprenne qui pourra — nous ne sommes pas du genre à éviter les sujets qui fâchent…
Niveau 2
Un roman d’anticipation féministe et étonnant.
Pour la petite histoire, nous cherchions un roman d’anticipation à analyser en classe, dans la veine de 1984 de George ORWELL (que nous avons souvent fait lire à nos élèves). Amandine, qui a toujours le flair, nous a trouvé ce roman d’un écrivain dont nous pensions déjà beaucoup de bien (beaucoup de bien ici et ici). Et ça se confirme.
Donc nous sommes dans le futur, à la fin du vingtième siècle (le livre a été écrit en 1985) et nous écoutons le récit de Defred, une jeune femme habillée de rouge et coiffée d’un voile qui la cache aux regards des hommes. Elle est au service d’un Commandant et de son Epouse : elle est chez eux pour être fécondée. Depuis quelque temps, les naissances sont de plus en plus rares et les couples des classes dirigeantes peuvent avoir recours à ces mères porteuses à domicile, servantes silencieuses et désincarnées. Defred passe son temps à attendre et, par bribes, à penser à avant, au monde d’avant la République de Gilead. Elle était mariée à Luke, avait une petite fille. Mais où sont-ils maintenant ?
Est-il possible pour Defred de devenir cet objet de reproduction qui n’aurait pas de passé et pas d’avenir ? Est-il possible de faire à jamais disparaître le désir et ne limiter l’acte sexuel qu’à la reproduction ? Et comment la démocratie américaine a-t-elle pu en arriver là ?
C’est par petites touches qu’ATWOOD nous décrit la société de Defred, ses codes, son histoire et ses pratiques barbares. Elle imagine ici que la droite ultra-religieuse américaine s’empare du pouvoir, aidée en partie par certains mouvements féministes anti-pornographie. Le tout aboutit à la construction de cette femme-objet, mi-nonne mi-prostituée, soumise et contrôlée. On n’est pas loin de la société de 1984 à ceci prêt que chez ATWOOD ce ne serait pas les progrès technologiques qui permettraient l’instauration d’un régime totalitaire mais plutôt le fanatisme religieux.
Quand on sait combien le débat autour du retour du religieux et de l’effacement de certains principes de la laïcité est d’actualité (notamment la séparation de l’Eglise et de l’Etat), on se dit que La servante écarlate est une mise en garde puissante et pertinente. Le livre est parfois dur, certaines situations peuvent paraître malsaines, mais elles ne sont pas gratuites et servent à dénoncer une dérive et à questionner la place de la femme dans la société.
La force du livre réside également dans la finesse de sa construction et dans la justesse du ton : une distanciation entre le personnage et ce qui lui arrive. On est pris, captivé et tenu en haleine par ce roman qui pourtant se construit lentement. Et les dernières pages, d’une incroyable efficacité, nous amènent vers un autre niveau de lecture (mais nous n’en dirons pas plus…).
Pour terminer, une anecdote qui nous fait sourire, alors que nous nous apprêtons à faire lire ce roman à nos élèves : La servante écarlate a récemment donné lieu à une polémique au Canada. Un parent, dont l’enfant avait dû lire le roman à l’école, a estimé que cette lecture, qu’il considère comme trop brutale, anti-chrétienne et anti-islamique, n’était pas destinée à des adolescents.
Nous sommes déjà curieux de voir ce que nos élèves en penseront… Comme quoi — comprenne qui pourra — nous ne sommes pas du genre à éviter les sujets qui fâchent…
Niveau 2
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