Affichage des articles dont le libellé est Niveau 1. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Niveau 1. Afficher tous les articles

11 juillet 2013

Le généalogiste VS le linguiste

Code 1879 — Les Enquêtes du généalogiste, Dan WADELL
Le Linguiste était presque parfait, David CARKEET

Deux enquêtes policières avec, pour héros, deux non-policiers. Entre le généalogiste et le linguiste, mon cœur ne risquait pas de balancer…

L’inspecteur de police a depuis quelque temps déserté son poste. Dans les séries télé, on ne compte plus les exemples d’auxiliaires qui volent la vedette au flic : expert scientifique, mentaliste, archéologue, psy, … Le renouvellement du genre passe par un changement de casting. Et en littérature ? Adamsberg, Wallander, Erlendur, Fors (pour ne citer que les plus récents) devraient-ils craindre la concurrence ? Petit comparatif à partir de deux romans qui jouent (ou pas) la carte de l’originalité.

L’inspecteur londonien Grant Foster se retrouve avec un drôle de cadavre sur les bras : un homme poignardé, amputé des deux mains et sur le corps duquel apparaissent, gravées au couteau, d’étranges inscriptions. Afin d’éclaircir cette énigme, Forster fait appel aux services d’un généalogiste, plus habitué aux rayonnages des bibliothèques qu’aux scènes de crime. Rapidement, l’enquête fait remonter à la surface une autre affaire criminelle : une série de meurtres datant de 1879 qui entretient d’étranges points communs avec le présent.
Des meurtres, des indices qui s’accumulent, quelques fausses pistes et un brin de romance : rien de très original dans ce polar qui tente de recréer l’ambiance mystérieuse du Londres de la fin du 19ème siècle. Cimetières, ruelles obscures, bas-fonds, … : tous les clichés sont au rendez-vous. L’élément original étant ici la présence du généalogiste qui, en fouillant dans les registres et les journaux de l’époque, éclaire le présent en replongeant dans le passé. La formule est d’ailleurs déclinée et répétée toutes les vingt pages, pour ceux qui n’auraient pas bien saisi le concept… Pour le reste, le style est plat et on devine assez vite l’issue de l’enquête (alors que je suis d'habitude le dernier à comprendre!). Je ferai donc l’impasse sur la suite des aventures du généalogiste (parue également chez Babel noir).

Autrement plus stimulant, Le Linguiste était presque parfait de David Carkeet parvient à conjuguer humour et suspense, tout en dressant une satire du monde de la recherche en sciences humaines. 
Jeremy Cook étudie l’acquisition du langage chez les jeunes enfants au sein de l’équipe de chercheurs en linguistique de l’institut Warbach, dans le sud de l’Indiana. Célibataire, passablement peu sûr de lui, plus proche de l’ours que de l’humain, il se demande ce qui lui a valu d’être traité de « trou du cul » par une jeune assistante du centre :

La formule initiale avait peut-être été « un vrai trou-du-cul », et le souvenir de Paula avait altéré la formulation originale en un « parfait trou-du-cul ». À moins que la sentence de départ ait été « une espèce de trou-du-cul » ou « un peu trou-du-cul sur les bords » ou « pas trop trou-du-cul » voire peut-être « pas un trou du cul contrairement aux autres ». […] Au yeux de quelqu’un à l’institut, il était un parfait — ou un vrai, un pauvre, un putain de, etc. — trou-du-cul, et cette personne en parlait à d’autres qui, à leur tour, le considéraient également comme (ou un vrai, un pauvre, etc.) trou-du-cul qui foirait tout.

Le meurtre étrange de l’un de ses collègues va cependant l’obliger à se concentrer sur un sujet hautement plus inquiétant : lequel des linguistes de l’institut est un assassin ?
Entre Agatha Christie et David Lodge, David Carkeet s’amuse avec le microcosme qu’il passe sous sa loupe pour mette en lumière les petits jeux de pouvoir, de solidarité et d’inimitié qui se nouent au sein de ce « tout petit monde ». Chaque personnage est un concentré de névroses, voire de folie : le directeur procédurier, les chercheurs inadaptés à la vie en société, le flic intello aux méthodes peu orthodoxes, … L’auteur parvient assez adroitement à mettre son personnage de linguiste à contribution et à utiliser, avec beaucoup de second degré, ses connaissances afin de résoudre l’enquête. Ce qui, pour quelqu’un qui passe son temps à modéliser les « areuhareuh » des nourrissons n’était pas gagné d’avance… 
Deuxième découverte d’un roman sorti de chez Monsieur Toussaint (après Karoo) et deuxième excellente surprise, avec à nouveau un vrai plaisir lié aussi à l’objet-livre soigné et élégant.

Référence :
Dan WADELL, Code 1879 — Les Enquêtes du généalogiste, traduit de l’anglais (Grande-Bretagne) par Jean-René Dastugue, Babel noir, 2012. (Niveau 1)
David CARKEET, Le Linguiste était presque parfait, traduit de l’anglais (États-Unis) par Nicolas Richard, Monsieur Toussaint Louverture, 2013. (Niveau 3)

10 juin 2013

La mort vous va si bien

Histoire d’Alice qui ne pensait à rien (et de tous ses maris, plus un), Francis DANNEMARK

Petit traité belge sur l'optimisme. Plaisant.  

Lors de l'enterrement de sa mère, Paul rencontre Alice, sa tante, revenue à Bruxelles après de longues années pour rendre un dernier hommage à sa sœur. Pendant plusieurs jours, à la demande d'Alice, Paul écoutera l'histoire de cette femme au destin singulier, lors de rendez-vous qui se placeront sous le signe de la bonne chère. En effet, chaque soir, Paul emmènera Alice dîner dans un restaurant différent et écoutera cette Shéhérazade lui raconter une vie pour le moins exceptionnelle.
Car Alice a eu neuf maris et autant de veuvages.
Et pourtant, cette vieille dame qui sera toute sa vie poursuivie par la mort, restera d'un optimisme à toute épreuve, profitant de chaque instant, et surtout de chaque personne, et grappillant tous les instants de bonheur que la vie pourra lui offrir.
Ainsi, Alice quittera la Belgique, juste après la guerre et la mort de ses parents et de son fiancé, et partira pour l'Angleterre. Ensuite elle voyagera, emmenée par les hommes de sa vie, d'Italie en Indes en passant par Winnipeg. Son amie Maggie, mère de son premier époux, sera son port d'attache et elle trouvera, après chaque drame, refuge chez la vieille dame qui la soignera à coups de tasses de thé, de jardinage et de phrases bien senties sur le bonheur.
Bien-sûr, avouons que le parcours d'Alice et la mort de ses neuf maris est parfois difficile à croire, que son optimisme à toute épreuve paraît quelque peu fabriqué et que les différents personnages ne sont qu'évoqués un peu superficiellement, ce qui ne permet pas réellement de s'attacher à eux. Le lecteur reste donc à distance du récit des aventures d'Alice.
Mais Alice donne à Paul et au lecteur, dans un petit roman sans prétention qui semble n'avoir d'autres objectifs que de nous faire sourire, une jolie leçon sur le bonheur. Et, au jour d'aujourd'hui, c'est toujours bon à prendre !

Références :
Francis DANNEMARK, Histoire d’Alice qui ne pensait à rien (et de tous ses maris, plus un), Robert Laffont, 2013.

11 avril 2013

Illégal

Dans la mer il y a des crocodiles, Fabio GEDA

La rencontre entre Fabio GEDA, éducateur et écrivain et Enaiatollah Akbari, jeune réfugié politique ou l'histoire vraie du périple d'un enfant afghan jusqu'en Italie.

Enaia dit qu'il a de la chance. Et pourtant, on ne peut pas dire que les fées se soient penchées sur son berceau. Né Hazara, une ethnie persécutée à la fois par les Pachtounes et les Talibans, dans un petit village d'Afghanistan, Enaia est destiné à mourir pour compenser la dette qu'a contractée son père en ayant eu la mauvaise idée de mourir alors qu'il transportait de la drogue pour le compte des Talibans. 
La mère d'Enaia le conduit alors près de la frontière pakistanaise et l'abandonne, considérant que la fuite, aussi dangereuse soit-elle, vaut mieux que la condamnation à mort qui l'attend dans son village.
Enaia a dix ans, ou peut-être onze. Il ne sait pas. Et il va devoir apprendre à survivre dans un pays en guerre où les enfants de sa condition sont nombreux et traités comme des animaux.
Il traversera l'Iran, la Turquie, la Grèce avant d'atteindre l'Italie, terre de salut. Il voyagera dans le double fond d'un camion, dans le ventre d'un cargo, sur un canot de sauvetage, dans les montagnes pakistanaises, ... Il verra certains de ses compagnons de fortune mourir sous ses yeux. Il sera dépendant des trafiquants d'êtres humains qui le feront voyager et travailler illégalement sur des chantiers, de la police qui bien souvent spolie les illégaux de leurs maigres biens. 
La force de ce récit est sans doute la totale absence de pathos. Enaia raconte les faits. Il évite de parsemer son histoire de sentiments. Il raconte son histoire et l'on comprend qu'il a dû laisser les émotions de côté pour pouvoir survivre dans un monde qui ne voulait pas de lui. Car l'histoire d'Enaia est avant tout l'histoire de la rage de vivre d'un enfant. Malgré la guerre, la peur, la faim et la souffrance, l'enfant se battra jours après jours pour trouver un lieu dans lequel il puisse vivre. Il trouvera finalement un lieu où il peut même être heureux. Il n'en attendait pas tant.
Le récit d'Enaia est de temps en temps interrompu par le compte rendu de ses entrevues avec Fabio. Fabio qui tente de lui faire parler de sa mère, de la vieille dame qui l'a nourri et habillé avant de le remettre sur la route avec cinquante euros en poche, de ses amis d'errance. Mais Enaia refuse : « Ce qui est important, c'est l'histoire. Pas les gens, ni les lieux. Mon histoire n'est pas personnelle, elle est celle de milliers de gosses et de femmes. »
Un récit plein de pudeur, donc. Et une histoire poignante qui rappelle ce que traversent de nombreux immigrés clandestins, les hommes, les femmes, les familles et les enfants, prêts à toutes les humiliations et les souffrances physiques pour tenter de pénétrer sur une terre un peu moins hostile, mais dont ils sont malheureusement souvent chassés à coups de pieds. Et une belle leçon pour tous ceux qui pensent encore qu'on ne "peut pas accueillir toute la misère du monde".
Le récit de Fabio GEDA s'est vendu à plus de deux-cent milles exemplaires. Inouï quand on sait qu'il a été écrit dans une Italie berlusconienne bien peu accueillante pour les immigrés clandestins.

Référence :
Fabio GEDA, Dans la mer il y a des crocodiles, traduit de l'italien par Samuel Sfez, édition Liana Levi, 2011. 

17 mars 2013

We could be heroes

The Perks of Being a Wallflower (Le Monde de Charlie), Stephen CHBOSKY

Un roman d’adolescence qui sonne juste.

Ado, la mixtape constituait, plus encore qu’une lettre, l’objet à travers lequel l’apprenti-amoureux que j’étais s’exprimait le mieux. À côté des messages transportés par les chansons, la K7 était également la promesse et l’expérience de la durée en amour. Le temps de la préparation : choisir les titres, calculer comment les répartir entre deux faces de 30 ou 45 minutes, l’une après l’autre les écouter à mesure qu’on les enregistre et recopier les titres sur le petit morceau de papier cartonné à glisser dans le boitier. Une occupation qui n’autorisait aucune distraction. Et puis venait l’autre durée, celle de l’écoute. Le plaisir de savoir que l’autre allait prendre le temps de découvrir un à un ces petits bouts de musique qui ne parleraient qu’à lui, qui lui montreraient combien mon goût en musique était à la fois original et éclairé, décalé et coolissime. En bref : une déclaration d’amour et un portrait à ma gloire !
Et puis parfois, à la mixtape offerte répondait une autre en retour. Le cadeau à écouter au creux de l’oreille, dans le casque du walkman qui ne me quittait pas.
Pourquoi vous raconter tout ceci me direz-vous ? Parce que c’est dans le monde des mixtapes et d’autres souvenirs de l’adolescence que le roman de Stephen Chbosky invite le lecteur à plonger.
Charlie a quinze ans, habite la banlieue newyorkaise et entame sa première année de lycée. Encore ébranlé par le suicide de son meilleur ami, ce jeune garçon timide et sensible raconte son quotidien dans des lettres adressées à un correspondant inconnu. La vie au lycée s’étire sous le signe de l’ennui et des rêveries solitaires d’un ado qui n’appartient pas à la frange populaire de l’école et qui semble, par peur d’y sombrer, presque étranger à la multitude de sentiments qui l’animent. Les lectures conseillées par son professeur d’anglais, qui lui fait découvrir les grands auteurs, sont un refuge dans lequel il oublie un temps sa mélancolie. La rencontre avec deux élèves plus âgés, Patrick et la jolie Sam, va chambouler son univers et lui faire découvrir l’amitié, le sentiment d’appartenance à un groupe et, bien sûr, les premiers émois amoureux.
J’avais vu l’adaptation au cinéma, réalisée par l’auteur, et malgré tous les défauts du film, j’avais été touché par la justesse du ton et du regard sur l’adolescence. Et puis le billet d’Émeraude (ou plutôt son grand cri d’amour) m’a donné envie d’aller voir ce qu’il en était du roman, presque inconnu chez nous mais gros succès d’édition aux États-Unis1. (Et pour ceux qui ont parfois peur de lire en VO, c’est d’un niveau très accessible.)
Ici aussi, malgré certaines facilités et quelques ficelles un peu attendues, j’ai été emporté par le parcours de Charlie, cousin du début des années 1990 du Holden de L’Attrape-cœurs, par l’écriture, douce et sensible et par toutes les références à une époque pas si lointaine (pour peu, on pourrait presque ranger le livre dans la catégorie des romans historiques!). 
Face à certains livres, on met parfois de côté tout son attirail critique parce qu’il y a quelque chose qui résonne en vous de manière très puissante. Même si mon parcours n’est pas le même que Charlie, j’ai retrouvé cette impression propre à l’adolescence où tout semble vécu de manière intense, où les émotions débordent de partout et où chaque nouvelle expérience émerveille autant qu'elle inquiète. 
Et puis un livre qui vous donne envie d’écouter du Bowie, de (re)fumer un pétard ou de revoir The Rocky Horror Picture Show… ou de recevoir une jolie une mix-tape, c’est déjà pas mal, non ?

Références :
Stephen CHBOSKY, The Perks of Being a Wallflower, Simon & Schuster, 2009.

1 Le livre est sorti en français dans une collection jeunesse, d’abord sous le titre Pas raccord puis réédité avec le titre du film, Le Monde de Charlie (traduit de l’anglais par Blandine Longre, Éditions Sarbacane, 2008, nouvelle édition en 2012). À noter que ce titre est d’une parfaite idiotie et ne rend pas du tout compte de la poésie du titre original (qu’on pourrait traduire, en gros, par Les avantages d’être passe-partout).

7 août 2012

Parce que la vie est un sport ?

Hunger Games, Suzanne COLLINS

Un roman d’anticipation, best-seller auprès des 15-18. Harry Potter ira-t-il ranger son balai au placard ?

Il y a plusieurs mois, en classe, nous parlions des romans d’initiation et l’un de mes élèves a fait référence à Hunger Games. Je ne connaissais pas et j’ai eu le malheur de le dire. Silence total. C’est un peu comme si j’avais demandé qui était Harry Potter… Ou sorti une cassette audio de mon sac. Bref : j’avais officiellement l’âge de leurs grands-parents !
Un peu plus tard, j’ai raconté l’anecdote à Juliette, la fille d’un couple d’amis avec qui je fais un peu de grammaire de temps en temps. Entre une subordonnée relative et un complément du groupe adverbial (no comment), elle m’a expliqué que ce livre était l’un de ses préférés. Et, voyant peut-être qu’il en allait de ma réputation auprès de mes élèves, elle m’en a gentiment fait cadeau. J’ai donc lu Hunger Games, sans a priori et même plutôt curieux.
En Amérique du Nord, dans un futur plus ou moins proche, les douze districts de Panem doivent chaque année s’affranchir d’une étrange taxe. Deux enfants de chaque district sont tirés au sort pour participer à un jeu télévisé où vingt-quatre candidats doivent s’entretuer dans un environnement hostile jusqu’à ce qu’il ne reste qu’un seul participant. Katniss, 16 ans, va se porter volontaire afin d’épargner sa petite sœur et découvre l’enfer des Hunger Games…
L’intrigue tient assez bien la route (même si on imagine mal l’héroïne se faire dégommer au début de l’épreuve…) et ce roman d’anticipation a parfaitement intégré, à travers l’idée du jeu télévisé, l’omniprésence du regard de l’autre sur nos actions et nos émotions. Dans ce Koh-Lanta mortel, les participants sont constamment filmés et écoutés par des caméras invisibles et c’est par d’énormes écrans qui apparaissent dans le ciel qu’ils apprennent chaque jour le nom des éliminés. Consciente de son rôle dans cette société de l’image et du spectacle, Katniss doit, en plus de sa lutte contre le froid, la faim et les autres concurrents, anticiper les attentes des spectateurs avides de sensations fortes afin de sauver sa peau.
Du point de vue de l’écriture, c’est un peu indigeste. Abondance de dialogues bourrés de stéréotypes, absence de style, flash-backs appuyés… Le plus ennuyeux est la volonté de l’auteure de tout expliquer des pensées du personnage, qui n’est pourtant pas bien difficile à comprendre. Il est quand même étonnant de voir que la demoiselle, un peu greluche sur les bords, à la veille du début des jeux, s’inquiète beaucoup de sa tenue et de ses cheveux… Le plus dérangeant reste le fait que les personnages ne semblent jamais véritablement se rebeller face au système fasciste qui les pousse à s’entretuer. La révolte est peut-être abordée dans les tomes 2 et 3 mais je crains que pour moi l’aventure s’arrête ici.

Avis partagé par Argali; plus d’enthousiasme chez Liliba.

Référence :

Hunger Games, Suzanne COLLINS, traduit de l’anglais (États-Unis) par Guillaume Fournier, Pocket Jeunesse, 2009.

3 avril 2012

Dilemme cornélien

Mitsuba, Aki SHIMAZAKI

Shimazaki, avec sa grâce habituelle, parvient à faire d'un roman sur l'industrie japonaise, un récit des plus intimistes.

Takashi Oaki est un homme d'affaire consciencieux. Respectueux de la hiérarchie, il a monté les échelons un à un, dans la compagnie Goshima, celle où travaillait jadis son père, avant de mourir brutalement d'un arrêt cardiaque. Takashi s'apprête donc à embrasser la carrière de shôsha-man et se prépare à passer quelque temps à Paris pour la compagnie. Rien, donc, n'est censé le détourner de ce chemin tout tracé si ce n'est la jolie Yûko, qui travaille à l'accueil de la compagnie, et de qui Takashi va tomber amoureux. Leur idylle va naître, peu à peu, au détour des conversations qu'ils auront ensemble au café Mitsuba où ils aiment se retrouver.
Mais cet amour naissant ainsi que les confidences de son collègue, qui fait passer sa famille avant son travail, et les découvertes qu'il fait sur les circonstances de la mort de son père vont remettre en question toutes les certitudes de Takashi et ses illusions sur le bon fonctionnement de la compagnie mais aussi de toute la société japonaise.
L'amour mutuel que se portent Takashi et Yûko survivra-t-il aux pressions de la compagnie ? L'épilogue, situé quinze ans plus tard que le récit principal, nous le dit et est une jolie pirouette de ce récit de toute beauté.
Shimazaki, dont nous avions adoré la pentalogie Le poids des secrets, est japonaise mais vit désormais au Canada. On retrouve dans Mitsuba toute la délicatesse de l'écriture de l'auteur qui parvient à parler d'amour tout en faisant le bilan d'une société japonaise engluée à la fois dans ses traditions et dans son élitisme, d'en montrer toute la beauté et toute la rigueur avec très peu de mots. 
Si les auteurs français aiment souvent beaucoup beaucoup parler, parfois pour notre plus grand bonheur (Proust ou Balzac), parfois pour notre plus grand agacement (non, non, non, je résiste et je ne cite personne), les auteurs japonais semblent mettre un point d'honneur à trouver la formule la plus courte. Et c'est étonnamment efficace. C'est d'autant plus remarquable que Shimazaki écrit désormais en français.
La brièveté de cette critique a donc, vous l'avez compris, comme but de rendre hommage à l'écriture de l'auteur. Donc, chut, je n'en dirai pas plus !

Référence :
Aki SHIMAZAKI, Mitsuba, Acte Sud, 2006

12 février 2012

La délicat...quoi ?

La délicatesse, David FOENKINOS

À de moins de vivre sur une autre planète, comment ne pas avoir entendu parler de La délicatesse. Révélation littéraire ou imposture médiatique ? Quelques mots de ce désormais phénomène littéraire (et maintenant cinématographique).

Je me méfie toujours des grands succès de librairies... Surtout s'il s'agit d'un livre français contemporain. Snobisme ! me dirait ma sœur. Pourquoi un livre qu'on voit dans toutes les mains, sur tous les étals et dont tout le monde parle serait moins bon qu'un autre ? Parce qu'il n'est pas assez élitiste ? Et puis quoi, si ça se trouve, j'éprouverais un réel plaisir à sa lecture, même si par la suite il ne m'en reste pas grand chose. Ce serait peut-être un livre à rajouter à la liste des fameux page turner dont on vous a parlé ici.
Et voilà qu'après toutes ces réflexions philosophiques édifiantes, le hasard (où plutôt l'un des membres de notre groupe de lectures destinées aux élèves) me le met entre les mains. Certes, j'ai bien vu que le propriétaire du livre avait l'air un brin embarrassé et pas du tout sûr d'avoir raison de le proposer, mais, n'écoutant que mon courage, pleine de bonnes résolutions dont celle d'acquérir une plus grande ouverture d'esprit, et voyant là un signe que le destin voulait me faire lire ce fameux bouquin, je suis rentrée chez moi avec La délicatesse et (après avoir tourné autour pendant quelques semaines) ai entamé la lecture du roman de Foenkinos, déjà adapté en film par l'auteur lui-même et son frère, et avec dans le rôle titre  notre délicat compatriote, François Damiens.
Je l'ai lu d'une traite, en deux jours à peine, et j'éprouve maintenant une réelle joie... Non pas celle d'avoir découvert un livre étonnant, subtil et passionnant à la fois, non pas celle liée à la recherche frénétique du nom des autres romans de l'auteur et de me précipiter dans une librairie pour les acheter... non, non, non, rien de tout cela. Juste la joie de pouvoir dire beaucoup beaucoup de mal d'un livre d'une platitude tellement inouïe que je n'ai pas le moindre scrupule à attaquer son auteur pourtant probablement plein de bonnes intentions (quoique, à bien y réfléchir, c'est même pas sûr). 
La Délicatesse (qui n'a, vous l'avez compris, de délicat que le nom) est l'histoire d'un deuil, celui de la pauvre mais tellement jolie et attirante Nathalie qui perdit, dans un accident de jogging, son bien aimé, celui qui avait décidé que si elle commandait un jus d'abricot ("un petit peu original sans être toutefois excentrique") lors de leur première rencontre, il l'épouserait. Et devinez ce qu'elle choisit ?
Bref, Nathalie est triste (mais l'auteur avait justement précisé en début de livre, dans une de ses horripilantes notes en bas de page, qu'"il y a souvent une nette tendance à la nostalgie chez les Nathalie"), et malgré que tout le monde veut soit la draguer, soit en faire son amie, elle choisit délibérément la solitude. Jusqu'au jour où, sur un coup de tête (qu'on ne comprendra, nous lecteurs peu sensibles, absolument jamais) elle décide d'embrasser fougueusement Markus, un de ses collaborateurs qui à première vue n'a aucun intérêt. Sauf que le garçon en question s'avère finalement beaucoup plus... délicat qu'il n'en a l'air.
Voilà, c'est tout. La fin est exactement celle que vous imaginez et à part deux ou trois personnages secondaires, il n'y a absolument rien d'autre dans le livre. Ah, si : il y a les notes en bas de page suscitées et de petits chapitres sans aucun intérêt qui entrecoupent l'histoire et qui vont du numéro de code de l'immeuble de Markus à trois aphorismes de Cioran que le personnage a lus dans le RER, en passant par les paroles de la chanson que Nathalie a écoutée dans la voiture ou encore le nombre de paquets de Krisproll vendus en 2002.
Rajoutons que pour être sûr que nous ayons compris le message et le thème général du livre, Foenkinos a décliné le terme "délicat" sous toutes ses formes à peu près une fois par page.
Pour ma part, je ferai preuve d'une certaine délicatesse et vous épargnerai les excellents jeux de mots qui me sont venus à l'esprit en écrivant ce billet et qui parlaient tous du très prononcé contraste entre le titre du livre et son contenu. 

Référence :
La délicatesse, David FOENKINOS, Gallimard, Folio, 2011.

6 février 2012

Raconte-moi des histoires

Storyteller, James SIEGEL

Un page turner efficace. What else ?

Un journaliste en disgrâce, ancienne star d’un grand quotidien new-yorkais, traîne ses remords dans une petite ville de Californie où il couvre, pour la feuille de chou locale, le quotidien ô combien passionnant de ce trou perdu : inauguration de galeries commerçantes, jubilés divers, élevages d’alpagas… Un accident de la route anodin finit par éveiller son intérêt. C’est le premier élément d’une enquête saisissante qui va l’amener vers une actualité digne d’un Pulitzer. Mais comment faire éclater la vérité quand vous avez été condamné par toute la profession et le grand public pour vos mensonges ?
Pas nécessaire d’en dire plus. Nous avons ici un véritable page turner efficace, de ceux qu’on dévore avec avidité jusqu’à la dernière ligne. Rien de bien révolutionnaire pourtant mais un roman qui tient toutes ses promesses, vous surprend souvent et parvient à faire exister ses personnages par une écriture dynamique et non dénuée d’humour. Ce qui n’est pas toujours le cas dans ce genre de littérature.

Storyteller a déjà pas mal tourné sur les blogs et les avis sont unanimes (comme chez Keisha, Clara ou Cynthia).

Référence :

Storyteller, James SIEGEL, traduit de l’anglais par Simon Baril, Cherche midi, 2011.

2 février 2012

(Re)Lire ses classiques #6

L’attrape-cœurs, J.D. SALINGER

Bon. Je me représente tous ces petits mômes qui jouent à je ne sais quoi dans le grand champ de seigle et tout. Des milliers de petits mômes et personne avec eux je veux dire pas de grandes personnes – rien que moi. Et moi je suis planté au bord d'une saleté de falaise. Ce que j'ai à faire c'est attraper les mômes s'ils s'approchent trop près du bord. Je veux dire s'ils courent sans regarder où ils vont, moi je rapplique et je les attrape. C'est ce que je ferais toute la journée. Je serais juste l'attrape-cœurs et tout. D'accord, c'est dingue, mais c'est vraiment ce que je voudrais être. Seulement ça. D'accord, c'est dingue.

Holden Caulfield, 16 ans, a de nouveau été renvoyé de son école. Avant que ses parents n’apprennent la nouvelle, il décide de passer trois jours à New York. Déceptions, déconvenues, rencontres éphémères, … Holden s’enfonce peu à peu dans une spirale désenchantée.
J.D. Salinger a publié ce premier roman en 1951 et l’on y ressent l’extrême difficulté d’être pour un adolescent dans l’Amérique de l’après-guerre. Pas d’euphorie, pas de triomphe mais bien l’impression d’un monde qui n’a plus de sens et, surtout, que les adultes ne sont plus là pour rassurer les enfants. Holden cherche à s’accrocher désespérément à quelque chose mais le monde lui échappe et il ne peut que lui adresser son éternelle insatisfaction. Tout ça le « tue », comme il le répète durant toute sa confession.
Mais au-delà d’un instantané sur l’époque, ce roman culte est avant tout un formidable portrait de l’adolescence. Holden est coincé entre le monde des enfants et celui des adultes. Ses besoins semblent inconciliables : il recherche à tout prix le contact avec les autres mais, au final, il est toujours déçu ou abandonné. D’un côté, ce petit frère mort dont il ne peut faire le deuil ; de l’autre, un grand frère, l’une des rares figures masculines qui semble le rassurer, est parti pour Hollywood. Entre ces deux absences, Holden va errer dans la ville, durant ces trois jours, de bars minables en appartements cossus, à la poursuite d’une ligne de fuite.
En cherchant un roman initiatique et vaguement réaliste pour mes élèves, je me suis souvenu de ce classique de la littérature américaine. Si, avec le recul (je n’ai plus seize ans depuis bien longtemps), j’ai l’impression qu’on a rarement parlé aussi justement de l’adolescence, reste à voir ce qu’en penseront les élèves…

Un billet chez Blake.

Référence :

L’attrape-cœurs, J.D. SALINGER, traduit de l’anglais par Annie Saumont, Pocket, 1994.

10 juin 2011

Polar et terroir

L’armée furieuse, Fred VARGAS

Du concentré d’Adamsberg, de la drôlerie et une enquête qui draine dans son sillage une étrange légende médiévale. Du VARGAS AOC.

Le passage de l’Armée furieuse est annonciatrice de morts et de malheurs. Il n’en faut pas plus pour alarmer un petit village normand : cette légende médiévale vient raviver les esprits et créer la suspicion entre les habitants. Qui seront les victimes du seigneur Hellequin et pour quelle faute seront-ils emportés ? La superstition n’est pas du goût d’Adamsberg qui se retrouve chargé de l’affaire et en profite pour quitter Paris et organiser de loin l’enquête autour de la mort d’un riche industriel. Un coupable est tout désigné mais l’instinct du commissaire ne veut pas y croire. Et quand Adamsberg a un doute, difficile de l’en détourner.

Quand elle ne s’occupe pas de Battisti ou d’imaginer une combinaison anti-grippe aviaire, Fred VARGAS revient aux enquêtes du plus lunaire des commissaires et après presque trois ans de silence nous donne enfin des nouvelles de son personnage fétiche. Quelques lignes à peine suffisent pour replonger dans cet univers singulier (les dix premières pages forment d’ailleurs une nouvelle d’une incroyable efficacité), ce lieu où le polar traditionnel prend des couleurs originales, au rythme des légendes et des étrangetés qui hantent les romans de l'auteure. Un lieu mais aussi une famille de policiers loin des clichés du genre. Une brigade improbable et pourtant terriblement efficace, à l’image de son commissaire : un drôle d’oiseau aux intuitions foudroyantes pour qui une promenade en forêt vaudra toujours plus qu’un rapport de police.

Avec toujours autant de drôlerie et de maîtrise, VARGAS ballade le lecteur du monde rural à celui des puissants, balançant ici et là sur les privilèges de classe et la justice à deux vitesses. Les amateurs retrouveront tout ce qui leur a plu dans les précédentes enquêtes. Quant aux autres… Mais quels autres ?


Référence :
L’armée furieuse, Fred VARGAS, Viviane Hamy, Coll. Chemins Nocturnes, 2011

27 mai 2011

Légère gourmandise



Une gourmandise, Muriel BARBERY

Un petit roman qui prouve qu'aimer la nourriture ne veut pas toujours dire aimer les gens...

On se souvient, bien-sûr, de L'élégance du hérisson, expression qui caractérisait si bien le personnage haut en couleur d'une concierge en apparence revêche et acariâtre mais en réalité férue de culture et amoureuse des belles choses. On se souvient de sa rencontre avec la petite Paloma, si jeune et déjà désespérée du monde dans lequel ses parents, épouvantables intellectuels de la gauche caviar, névrosés et désabusés, l'avaient propulsée sans demander son avis. Et on se souvient, bien-sûr, du nouveau locataire, ce japonais charmant, qui les séduira toutes deux. Mais se souvient-on du précédent locataire de cet appartement ? C'est pourtant par sa mort que s'ouvre L'élégance du hérisson. Et c'est surtout le personnage principal du premier roman de Muriel BARBERY, sorti six ans avant le Hérisson, tout petit bouquin qui narre les derniers instants d'un très reconnu critique gastronomique.
C'est donc principalement de nourriture que parle ce roman. Car le maestro de la cuisine tente de savoir ce qu'il veut manger avant de mourir. Il fouille sa mémoire pour retrouver ce goût qui, comme la vie, lui échappe inexorablement. Alors il repense aux plats de son enfance, au ragoût de sa grand-mère, aux herbes du jardin de sa tante, à son premier sashimi, à son premier verre d'alcool... Et il nous décrit tout ça avec passion et amour.
Mais son récit qui donne l'eau à la bouche est ponctué du regard que posent les autres, ceux qui, de près ou de loin, ont fréquenté le maître et l'ont subi. Car très vite on comprend que notre héros aime les plaisirs de la bouche mais pas ceux de la vie sociale. Ainsi ne s'est-il jamais intéressé à ses deux enfants et encore moins à ses petits enfants, ainsi a-t-il bafoué sa femme qui malgré les années et l'indifférence de son mari reste passionnément amoureuse de lui, ainsi est-il craint et parfois haï de ses collègues, des femmes qu'il a séduites et abandonnées et surtout de sa propre famille. Seule sa femme de ménage voit en lui quelqu'un de bien.
Le livre, bien sûr, pour peu qu'on aime un peu manger (ce qui, je vous l'avoue, est mon cas!) donne l'eau à la bouche. Par ailleurs, on retrouve le style direct et dynamique de BARBERY ainsi que ses descriptions truculentes et ses considérations philosophico-psychologiques pleines de verve. Mais on pourrait regretter, outre le fait que le personnage, du haut de son mépris pour le genre humain, nous soit tellement antipathique qu'on se surprend à avoir envie de le voir mourir plus vite, la longueur du livre qui ne permet jamais vraiment de "rentrer dedans", ... En alternant descriptions culinaires (parfois un peu longuettes) et les réflexions des proches du futur défunt, l'auteur laisse un impression d'un petit livre décousu qui manque un peu de corps. Une gourmandise... un peu light.

Référence :
Muriel BARBERY, Une gourmandise, Gallimard, 2002, Folio pour l'édition de poche.

18 avril 2011

Piège en direct

Faute de preuves, Harlan COBEN

Le dernier COBEN, une junk food agréable mais pas indispensable...

Le subtil travail de Wendy Tines consiste à rien de moins que de piéger des pédophiles en direct à la télévision. Faut-il être américain pour ne pas tiquer sur la profession pas très éthique de la dame ? Toujours est-il qu'il n'est pas forcément évident de se sentir des affinités avec l'héroïne en question.
Bon, évidemment, COBEN nous montre tout le danger de ce genre de pratique puisque la dernière victime de Wendy, le pauvre Dan Mercer, semble assez vite au lecteur, et même à la perfide Wendy, blanc comme neige. Un héros tel que seul COBEN peut en concevoir, charmant, généreux, drôle bien qu'un peu écorché... Quelque temps plus tard, la disparition d'une adolescente sera elle aussi attribuée à Dan. C'est alors que Wendy décide de creuser un peu le passé de celui dont elle a détruit la vie. Elle rencontre ainsi ses anciens camarades d'université qui semblent tous cacher quelque chose..
Intrigues à tiroirs, personnages sensibles ayant tous vécu des drames personnels et quelques questions plus ou moins existentielles sur le pardon et la responsabilité, tous les ingrédients de COBEN sont bien sûr réunis dans ce dernier opus. Soulignons que le récit est un peu moins invraisemblable que dans ses dernières productions mais avouons qu'on ne retrouve plus le côté haletant des premières œuvres (dont on a longuement parlé ici) qui nous faisait dévorer ses livres des nuits entières. On ne retrouve dans les derniers Harlan COBEN ni la subtilité des polars nordiques, ni  la noirceur et l'envergure de certains de ses collègues américains. Lire COBEN aujourd'hui donne autant de plaisir que de manger un Mars quand on a l'habitude de manger des pralines belges, un hamburger du Quick quand on ne mange que des petits plats bio,... bref, vous avez compris la métaphore : ça rend un peu coupable mais ça va vite et ça fait du bien à condition de ne pas en abuser.

Merci à Athomedia pour ce partenariat

Référence :
Harlan COBEN, Faute de preuves, Belfond, 2011

12 janvier 2011

La petite famille dans la prairie

Montana 1948, Larry WATSON

Court roman d’initiation et d’apprentissage du métier de fils dans les grandes plaines du Montana.

Les romans qui ont pour cadre les grands espaces américains ont souvent un goût d’âpreté, de rugosité un peu sauvage qui donne aux drames qui s’y jouent un sel particulier (comme ici). Et la petite ville du Montana où habite David Hayden ne faillit pas à la règle. Des terres à perte de vue, la réserve d’Indiens, les grandes propriétés, un monde d’hommes et de traditions : tout y est. David, douze ans, est le fils du shérif, un homme débonnaire qui exerce sa profession à regret et avec douceur. A-t-on jamais vu un shérif se balader sans son insigne et sans son arme ? Le père de David aurait pu être avocat, partir pour la grande ville, mais dans la famille on est shérif de père en fils, tradition que le patriarche entend bien faire respecter. L’oncle de David a lui fait des études de médecine. C’est le fils prodigue, héros de guerre, docteur très respecté, préféré du patriarche. Mais quand la jeune indienne qui travaille dans la maison de David en vient à porter de graves accusations à l’encontre de cet oncle aimé de tous, les fêlures de la famille apparaissent au grand jour et les liens du sang partent à l’assaut de la justice. Que choisir : être fidèle à sa famille ou à ses convictions ? Le père de David devra prendre de lourdes décisions, sous l’œil de son fils qui, cet été-là, quittera définitivement le monde de l’enfance.

Dans ce roman d’initiation écrit en 1993, l’auteur parvient à rendre assez justement le regard d’un enfant de douze ans sur les valeurs et les enjeux de pouvoir au sein de sa famille. Le thème de la filiation, de la fidélité au père, des rivalités entre frères sont ici amenés avec beaucoup de sincérité et de simplicité. Même si le style n’est pas la qualité première du roman, WATSON parvient cependant à créer une atmosphère particulière, lourde de tension et toujours au bord de l’explosion, comme si les hommes de ces terres immenses avaient gardé en eux toute la fureur dont la nature peut être capable.

Un livre découvert chez In Cold Blog qui dans son billet fait également part d’autres commentaires blogoboulesques.

Référence :
Larry WATSON, Montana 1948, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Bertrand Péguillan, Gallmeister, 2010.

17 décembre 2010

Mort d'un parfait basketteur

Sans un adieu, Harlan COBEN

Le dernier roman de la star américaine du roman policier est en réalité son premier. Au roman des origines, on préfère les plus aboutis...

Inutile, évidemment, de présenter Harlan COBEN. Il est présent, parfois grandeur nature, dans les rayons polar de toutes librairies. En quelques années, il est devenu le maître du genre, le virtuose du suspense et surtout, le roi de la rapidité. Car COBEN, qui doit rendre notre Amélie Nothomb verte de jalousie, publie un roman par an, sans faute, et les maisons d'édition, ne laissant bien entendu jamais passer l'œuf en or d'une poule talentueuse, ont ressorti des inédits (en langue française) nous inondant de polars cobeniens, parfois sans se soucier de la chronologie. Pas de bol pour le lecteur francophone qui lit les aventures du sympathique Myron Bolitar, ancienne star de basket reconverti en agent sportif et en enquêteur par la force des choses, dans l'ordre dans lequel sortent les traductions et qui se perd, du coup, parfois, dans les amours compliqués dudit Myron. Mais l'auteur écrit aussi des romans "one shot", mettant en scène des personnages qu'on ne reverra jamais... ou presque. Car, et tous ses lecteurs en conviendront, d'un livre à l'autre, ses personnages se ressemblent étrangement. Beaucoup de médecins et de (ex)champions sportifs charmants, drôles et ayant le sens de la répartie ; beaucoup de femmes dotées d'une "silhouette sublime" et d'un "visage au charme irrésistiblement exotique" ce qui ne les empêche jamais d'avoir un sacré caractère et une vraie intelligence. Bref, des individus à qui la vie sourit mais sur qui tombe en général une terrible tuile. Quant au style, il manque parfois un peu de finesse.
Et pourtant... ! Et pourtant, Harlan COBEN nous a prouvé, et plusieurs fois, son indéniable talent. Quelques-uns de ses livres sont des chefs d'œuvre du genre. COBEN maîtrise l'art de l'intrigue et du suspense comme personne (ou presque). Son style, certes un peu plat, est cependant dynamique et certains de ses dialogues particulièrement jouissifs. Et si ses personnages sont un peu fabriqués, ils sont tellement sympathiques qu'on a suffisamment envie de croire en eux pour s'y attacher et pour souhaiter qu'ils se sortent la tête haute des ennuis dans lesquels ils se sont fourrés.
Ainsi, des romans comme Ne le dis à personne (très bien adapté au cinéma par Guillaume CANET), Disparu à jamais ou Une chance de trop ont fait passer de nombreuses nuits blanches même aux plus sceptiques (dont je faisais partie... ). La lecture d'Harlan COBEN peut devenir une terrible addiction, d'autant plus dangereuse que la prolixité de l'auteur lui fait publier des romans parfois bien en dessous de ses capacités.
Mais revenons à cette dernière parution. Au début de Sans un adieu (les traductions des titres sont malheureusement pour le moins répétitives : Sans un adieu, Sans un mot, Sans laisser d'adresse,...) l'auteur nous met en garde : "OK, si vous n'avez rien lu de moi, arrêtez tout de suite. Rendez ce livre. Prenez-en un autre. Ce n'est pas grave. J'attendrai. Si vous êtes toujours là, sachez que je n'ai pas lu Sans un adieu depuis une bonne vingtaine d'années. Je n'ai pas voulu le réécrire. C'est un procédé qui me répugne." Tout est dit : il s'agit du premier roman de l'auteur encore "jeune ingénu travaillant dans le tourisme" et depuis devenu la star que l'on sait. De là à se dire que les éditeurs ont dit à leur poulain : "Harlan, donne nous n'importe quoi, on prend" et que COBEN est allé ressortir ce vieux manuscrit daté, il n'y a qu'un pas.
Laura, ex top model, et David, superstar de l'équipe des Celtics, passent leur lune de miel en Australie. Mais David part nager et... ne revient pas. On conclut à une mort par noyade. Lorsque Laura revient aux Etats-Unis, incapable d'admettre le drame, elle enquête sur la disparition de son homme et fait ressurgir de vieux secrets de famille.
On retrouve dans ce "roman des origines" bien des caractéristiques  cobenniennes : des personnages riches et beaux, une intrigue emberlificotée, plein de rebondissements. Les aficionados s'amuseront même à reconnaître certains personnages qui reviendront dans ses oeuvres postérieures. Hélas, le style est ici vraiment très pauvre, les personnages vraiment très artificiels et surtout, comble de l'horeur, l'intrigue à la fois prévisible et invraisemblable. Il m'est arrivé quelque chose qui ne m'était jamais arrivé auparavant (et je pense avoir lu toute son oeuvre) : j'ai presque tout compris dès le début.
Harlan COBEN a donc raison : si vous n'avez jamais rien lu de lui, prenez autre chose... Pour les autres, ma foi, faites-vous plaisir (mais tâchez qu'on vous prête le roman...).

Merci quand même aux éditions Belfond pour nous avoir fait parvenir ce roman.

5 décembre 2010

Have you reached your verdict ?

Verdict, Justin PEACOCK

Un roman judiciaire qui tient ses promesses.

Les polars traditionnels s’arrêtent souvent là où le coupable est arrêté. Mais après viennent les avocats et c’est un tout autre boulot qui commence. Victime ou coupable, chacun a le droit d’être défendu et, pour les avocats de la défense, il faut la jouer finement.
Joel Deveraux avait tout du jeune lion en passe de gravir les échelons d’une grande boîte d’avocats d’affaires à New York. Mais un penchant un peu addictif pour une substance prohibée et la mort par overdose de l’une de ses collègues vont mettre un terme brutal à ses espérances ; obligé de démissionner, il se retrouve tout en bas de l’échelle du prestige des hommes en robe : avocat commis d’office.
C’est ainsi qu’il est amené à seconder Myra, autre avocate pour qui ce poste a du sens et de l’importance, dans une affaire de meurtre ayant pour cadre le milieu du petit trafic de drogue d’une cité de laissés pour compte. L’accusé clame son innocence et le travail de ses avocats sera de démontrer aux jurés qu’il n’est pas le coupable que les apparences et les témoignages semblent désigner. Car plus que de se montrer défenseur de la vérité, l’avocat doit avant tout être un champion de la persuasion.
Un très bon suspense dans ce roman judiciaire (pas certain, comme le dit la couverture, que l’on puisse parler de "thriller") qui a comme principale originalité d’être extrêmement bien construit sur le plan juridique (américain). L’auteur, lui-même avocat, aborde presque son roman comme un documentaire sur le métier et, surtout, sur les situations morales et éthiques auxquelles sont confrontés ses pairs.
L’intrigue est efficace, les personnages crédibles et on ne reprend son souffle qu’une fois le bouquin refermé.
Allez, hop : sous le sapin !

Un libre lu dans la cadre d’un partenariat organisé par Blog-o-Book (que nous remercions, comme d’hab !) et Sonatine.

Les avis de Canel, de Manoes et de Pikkendorff.

7 septembre 2010

La beauté des myosotis

Le poids des secrets, Aki SHIMAZAKI

La pentalogie d'une auteur japonaise qui écrit en français : cinq objets de plaisir dans un seul coffret !

La particularité des Japonais est sans doute de nous faire apparaître toute la complexité de la vie et des relations entre les gens, en particulier d’une même famille, avec une fausse simplicité, une apparente légèreté et des tonnes de subtilité. Pour sa chronique familiale, Zola, dans la plus pure tradition littéraire française, nous pond vingt longs romans, truffés de descriptions, d’explications et de précisions (ce qui ne remet pas en cause toute l’admiration que j’ai pour Zola ! Pour preuve, lire ici). Aki SHIMAZAKI, elle, nous offre cinq tout petits romans (presque de longues nouvelles), sans bavardages, sans digressions. Même si l’auteur écrit en français, sa langue d’adoption (elle vit désormais à Montréal), on retrouve cette particularité de la langue japonaise de dire beaucoup en peu de mots. Dans Le poids des secrets, le lecteur se plonge dans de terribles secrets de famille et découvre des morceaux parfois méconnus de l’histoire japonaise.
Résumée, l’histoire a un air de déjà vu : un homme,  Monsieur Horibe, a une fille reconnue, Yukiko, et un fils illégitime du même âge, Yukio. Mais la force du récit tient dans le fait que dans chaque tome cette histoire est racontée par un personnage différent. Ainsi le premier tome, Tsubaki, semble tout nous raconter par la voix de Yukiko. Dans le second tome, Hamaguri, le récit, pris en charge par Yukio, prend une autre tournure. Le troisième tome, Tsubame, remonte le temps et nous parle de l’enfance de la mère de Yukio, Mariko, et dévoile le secret de ses origines comme pour mieux expliquer le chemin qui l’a conduite à sa vie actuelle. Dans Wasurenagusa, le quatrième tome de cette pentalogie, la lumière se fait sur le personnage de Kenji, le père adoptif de Yukio, qui a bravé sa famille et les interdits de la société de l’époque pour épouser Mariko. Enfin, Hotaru, dernier tome du cycle, redonne la parole à Mariko, qui confie à sa petite fille le reste des secrets de son existence.
Au fur et à mesure des lectures, l’histoire banale en apparence prend peu à peu une épaisseur insoupçonnée. Derrière les drames mais aussi l’évocation des grands et des petits bonheurs des membres de cette famille, se dresse l’Histoire japonaise: la seconde guerre mondiale, le bombardement de Nagasaki, le tremblement de terre de 1923,  la relation entre Japonais et Coréens et la persécution de ces derniers.
Tout le talent de SHIMAZAKI consiste à être parvenue à écrire une véritable saga familiale, à créer des personnages forts et attachants et à rendre un cadre historique de manière précise avec une concision étonnante. Et surtout, beaucoup de poésie.
A dévorer en une fois, comme un étonnant roman fleuve ou à savourer au compte goûte, en espaçant les cinq tomes. Un précieux coffret à offrir, à s’offrir, à se prêter, mais à ne pas rater.

16 septembre 2009

Ouvrez-moi la porte

Le Serrurier volant, Tonino BENACQUISTA

Un livre illustré pour adulte ou les périples d'un serrurier tourmenté.

Pourquoi les romans illustrés sont-ils réservés aux enfants. Pourquoi, nous, adultes et grands enfants (je pense à nos chers élèves…), ne pouvons-nous allier plaisir de la narration à celui de l’illustration, découvrir la suite d’une histoire par les mots ou par le dessin qui l’accompagne, enrichir le récit que l’on lit par les détails que l’on voit ? Il n’y a aucune raison, semblent répondre les éditeurs belges (un peu de nationalisme, faisons découvrir à nos lecteurs français un peu de notre patrimoine culturel, et promettons-leur d’ailleurs de publier tout bientôt un article spécial littérature belge) des éditions Estuaire qui ont eu la brillante idée de sortir des Carnets Littéraires, dont le principe est de faire collaborer un auteur avec un illustrateur. Ce n’est pas de la bande-dessinée, ni de la littérature jeunesse, mais bien de la littérature illustrée pour adulte. Comme une bonne idée ne vient jamais seule, les éditeurs ont pensé à Tonino BENACQUISTA pour écrire l’un des ouvrages de cette collection. BENACQUISTA, auteur prolifique, a écrit de nombreux romans, dont les très remarquables Saga, Quelqu’un d’autre et Malavita et est aussi scénariste (il a co-scénarisé avec Jacques Audiard les extraordinaires films Sur mes lèvres et De battre mon cœur s’est arrêté dont je me retiens avec difficulté de vous parler beaucoup plus longuement). Par ailleurs, il a également travaillé avec la bande dessinée puisqu’il a écrit l’adaptation d’une de ses nouvelles, La boîte noire, et un scénario original, L’outremangeur (qui a eu droit malheureusement à une maladroite adaptation au cinéma), tous deux illustrés par FERNANDEZ. Rien de surprenant donc à ce qu’on ait pensé à lui. Lorsqu’on lui a parlé du projet, BENACQUISTA a évoqué timidement le nom de TARDI, sans oser rêver que ce dernier accepte. Or, non seulement TARDI accepta de participer à l’un des carnets, mais sans savoir que BENACQUISTA avait pensé à lui, il proposa précisément le nom de cet auteur, avec qui il avait envie de collaborer depuis longtemps. Le hasard fait bien les choses. Sauf que ce n’est pas tout à fait le hasard. En effet, ces deux hommes ont bien des points communs : artistes populaires (au sens le plus élogieux du terme) ne se pliant jamais à aucun diktat de la mode culturelle, touches à tout (et avec brio), ils créent ou adaptent de vraies bonnes histoires, avec des personnages sombres mais franchement humains, des camarades terriblement attachants. De plus, tous deux ont un gros faible pour le polar (BENACQUISTA en a écrit de nombreux, TARDI a créé l’enquêteuse Adèle Blanc-Sec et adapté de nombreux Nestor Burma, le détective créé par Léo MALLET). Enfin, ils assument l’un et l’autre une culture populaire (BENACQUISTA dit que sa vocation d’artiste lui vient de la télévision) et n’en sont pas moins de vrais amateurs de littérature (TARDI a adapté, entre autres, des œuvres de CELINE). Ils étaient donc faits pour se rencontrer. De leur collaboration est né Le Serrurier volant : l’histoire de Marc qui, pour oublier la tragédie qu’il a vécue, quitte tout et se reconvertit en serrurier indépendant. Il ferme la porte de sa vie pour ouvrir celle des autres mais certaines serrures vont lui ouvrir des fenêtres sur le passé et lui permettre de penser à l’avenir. Une belle petite histoire, un conte moderne, bien écrit, bien ficelé, mis en valeur par les illustrations de TARDI qui représentent parfaitement l’ambiance décrite par BENACQUISTA. Deux art(tiste)s pour le prix d’un, double plaisir.

PS: il semblerait que les éditions Estuaire aient arrêté cette série, mais le volume BENACQUISTA-TARDI est disponible en Folio.

(Niveau 1)

1 juillet 2009

Qu'est-ce que tu lis pour les vacances 2009? #2 Made in England

Dans cette chaleur estivale, voire caniculaire… pourquoi ne pas plonger dans une rafraîchissante ambiance de fog londonien ou autre brume de la campagne anglaise. Car les romans anglais nous enchantent en ces temps où malheureusement, beaucoup d’auteurs français nous déçoivent. Alors, puisque ce sont les vacances, ne boudons pas notre plaisir.

Les vacances, c’est le temps des polars (on vous l'avait bien fait comprendre ici). Même ceux qui s’interdisent les romans policiers, de peur de perdre du temps pour la « vraie » littérature, se laissent volontiers entraîner dans les intrigues et les énigmes le temps des congés. D’ailleurs, la romancière Elizabeth GEORGE refuse de voir une différence entre « le roman à énigme » et le « vrai roman ». Si l’auteur est américaine (mais spécialiste de littérature anglaise, rassurez-vous), ses personnages sont on ne peut plus anglais. Ainsi, Enquête dans le brouillard fait apparaître le très aristocratique Thomas Lynley, membre de Scotland Yard, et celle qui deviendra son acolyte, la vilaine mais maligne Barbara Havers. Un duo étonnant mais efficace qui évoluera au fil d’une dizaine d’ouvrages ultérieurs parmi lesquels on peut citer Une patience d’ange ou le récent Anatomie d’un crime. Pour les nostalgiques d’Agatha Christie. (Niveau 1)
Rappelons encore que l’auteur Gyles BRANDRETH a fait revivre le personnage d’Oscar Wilde et le fait mener l’enquête, assisté de son ami Robert Sherard et d’Arthur Conan Doyle en personne. On vous parlait du premier tome ici; le deuxième tome, Oscar Wilde et le jeu de la mort, vient de sortir.

Outre les polars, certains livres, légers et charmants, se prêtent merveilleusement à cette période de farniente. C’est le cas du Cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates, roman épistolaire dans lequel une écrivain à succès va découvrir un bien étrange cercle littéraire, fondé inopinément en temps de guerre sur l’île de Guernesey, alors sous occupation allemande. Drôle et très attachant, ce roman écrit par deux romancières américaines (encore !), Mary Ann SHAFFER et Annie BARROWS, nous parle d’amitié, de solidarité et de littérature anglaise. (Niveau 1)
De littérature il est aussi question dans le roman La Reine des lectrices, à l’humour très british d’Alan BENNETT, dont on vous parlait ici.


Et pour terminer, parce que l'été c'est aussi le moment d'échapper au tourbillon incessant des sorties littéraires de l'année (avant le grand raout de la rentrée littéraire), il est parfois bon de se donner le temps de lire des auteurs classiques. Et comme nous parlons d'Angleterre, comment passer à côté de Jane AUSTEN. Dans Orgueil et préjugés, la jeune Elizabeth, une des cinq filles de la famille Bennet, incarne une héroïne d'une incroyable modernité (pour un roman publié en 1813). Dans une société où l'avenir d'une femme ne peut passer que par le mariage, l'arrivée à Netherfield Park d'un riche rentier et d'un de ses amis, l'orgueilleux Mr Darcy, met tout la famille d'Elizabeth en effervescence et déclanche une série de péripéties cruelles et drôles. Elizabeth, elle, est trop fière pour s'imaginer dépendre d'un homme, mais pourra-t-elle résister à l'amour? (Niveau 2). Du même auteur, suivez passionnément les errances sentimentales des sœurs Dashwood dans Raison et sentiments (Niveau 2).
Toujours dans les grands classiques anglais, retrouvons nos peurs d’enfant en lisant le très injuste sort d’Oliver Twist de DICKENS (Niveau 1) ou passons la journée avec Mrs Dalloway de Virginia WOOLF (Niveau 4) (qui a inspiré le magnifique roman Les Heures, de Michaël CUNNINGHAM - Niveau 3).

Have a nice time !

Première partie de Qu'est-ce que tu lis pour les vacances ici.
Tous les auteurs made in England sur le blog ici.

13 juin 2009

Qu'est-ce que tu lis pour les vacances 2009? #1

L’été est à nos portes et, pour nombre d’entre nous, c’est aussi bientôt les vacances !

Les journaux et les magazines ne vont pas tarder à recenser, si ce n'est déjà fait, ce qu’on appelle désormais les « livres de plage ». Alors nous aussi, et ce sera l’occasion de fêter la fin de la première saison de notre blog, nous avons voulu vous proposer quelques titres, d’hier et d’aujourd’hui, à emporter en vacances ou, ne soyons pas restrictifs, à la piscine, au parc, dans le jardin ou à la terrasse d’un café (l’idée étant, vous l’aurez compris, d’être détendus et prêts à se plonger dans une lecture captivante).

Commençons avec le grand ami des lectures de vacances : le polar !
Pour ceux qui auraient échappé au phénomène, profitez de l’été pour découvrir Millénium, la palpitante trilogie de Stieg LARSON (nous en avions déjà dit beaucoup de bien ici). Ou encore, les univers rafraîchissants d’autres auteurs du Nord (utiles en période de canicule) comme le champion de sa catégorie, Henning MANKEL. Certains connaissent déjà Le retour du professeur de danse, ou encore La lionne blanche (sans oublier Tea-Bag dont nous avons parlé ici. Nous vous conseillons cette fois-ci une autre aventure du commissaire Wallander : Les morts de la Saint-Jean (Niveau 2). Dans ce suspense digne des grands thrillers américains, nous suivons Wallander sur la piste d’un mystérieux tueur en série. Les indices s’accumulent mais ne se rattachent pas les uns aux autres. Le commissaire solitaire parviendra-t-il à arrêter le coupable avant de nouveaux meurtres ? (Pour d'autres auteurs venus du Nord, un petit rappel ici.)
Revenons dans nos contrées et amusons-nous avec les codes du polar traditionnel grâce aux enquêtes du commissaire Adamsberg de Fred VARGAS (Niveau 1). La romancière française est parvenue à créer, au fil de ses romans, un personnage lunaire et attachant, qui, dans ses drôles d’enquêtes, nous fait découvrir tout un univers décalé. Nous conseillons Pars vite et reviens tard, Sous les vents de Neptune et, le dernier sorti, Un lieu incertain, où Adamsberg suit la piste de tueurs de vampires…
Ou encore, pour les dandys amateurs de bons mots et d’énigmes, retrouvez Oscar Wilde jouant les Sherlock Holmes dans Le meurtre aux chandelles de Gyles BRANDRETH (Niveau 2). Wilde décide de mener une enquête suite à la découverte du cadavre d’un jeune garçon. L’occasion de voyager dans l’Angleterre de la fin du 19ème siècle, avec pour guide le flamboyant auteur du Portrait de Dorian Gray.
A la limite entre le polar et le roman de mœurs, Le dernier des Weynfeldt, de Martin SUTER (Niveau 3) (auteur dont nous avons déjà parlé ici). Adrian Weynfeldt, expert dans le marché de l’art et riche héritier d’une famille d’industriels zurichois, croise dans un bar Lorena, une mystérieuse femme qui, le lendemain, tente de se jeter du balcon d’Adrian avant de disparaître. Parallèlement à cette rencontre, un de ses connaissances lui propose de mettre en vente un faux : la copie d’un tableau du peintre Valloton… Et c’est le début des ennuis… Un roman élégant et léger sur le thème de la tromperie et du rapport à l’argent.


L’été, c’est aussi l’occasion de prendre le temps et qui dit temps dit : brique !
Nous avons déjà évoqué ici notre amour pour Jonathan COE. Si vous ne le connaissez pas encore, précipitez-vous sur le diptyque Bienvenue au club et Le cercle fermé (Niveau 3). Le premier roman suit le parcours d’un groupe d’adolescents à Birmingham dans les années 70. Premiers émois amoureux, questions existentielles et découvertes des idéaux, dans un climat de grands mouvements sociaux et politiques. Jonathan COE parvient, avec finesse et humour, à articuler la grande et la petite histoire. Dans Le cercle fermé, nous retrouvons les mêmes personnages, vingt ans plus tard. Que sont devenus leurs rêves et leurs espoirs à l’heure où le pays rentre dans le nouveau millénaire ?
Autre parcours, celui de Claude, jeune pianiste surdoué, héros de Corps et âme de Frank CONROY (Niveau 4). D’une enfance passée dans un appartement en sous-sol à New York à la découverte de son art, ce roman initiatique est une immersion dans le monde de la musique.
Plus léger mais tout aussi passionnant, L’ombre du vent, de Carlos Luis ZAFON (Niveau 3). Un best-seller international qui nous raconte les aventures d’un jeune garçon à la recherche d’un mystérieux écrivain à Barcelone à l’époque de Franco. Un roman haletant à la construction impeccable.

Dans la même catégorie (à savoir : ne soyez pas arrêtés par le nombre de pages), il y a encore Les falsificateurs d’Antoine BELLO, Le grand livre des gnomes de Terry PRATCHETT ou encore ces autres briques (et leur suite).

Pour changer un peu de ton, évoquons maintenant une saga qui est devenue, au fil des années, culte : Les chroniques de San Francisco d’Armistead MAUPIN (Niveau 2). Mary-Ann, une petite provinciale, débarque à San Francisco dans les années 80 et s’installe dans une maison tenue par Mme Madrigal, logeuse excentrique aux petits soins pour ses pensionnaires : Mouse, le jeune gay, Brian le séducteur ou encore l’étrange Mona. Tout ce petit monde cohabite joyeusement et vit de nombreuses aventures. MAUPIN est un dialoguiste hors pair qui parvient à captiver le lecteur dès les premières pages. On rit, on espère, on s’attache aux personnages et parfois on pleure un peu : c’est comme une série télé!

Aux Etats-Unis toujours, mais dans les années septante, Les charmes discrets de la vie conjugale de Douglas KENNEDY (Niveau 3). Malgré des parents progressistes, Hannah ne rêve que d’une vie tranquille auprès de son mari médecin. Mais l’ennui et la routine vont amener la jeune desperate housewife à se rendre complice d’un délit. Trente ans après, dans l’Amérique puritaine et sécuritaire de l’après 11 septembre, le passé d’Hannah refait surface et l’équilibre précaire de son quotidien de basculer… A travers la vie banale d’une mère de famille, KENNEDY dresse un portrait sans concession d’une société en proie à la paranoïa. (Et pour un mot sur son dernier roman, un petit clic ici). Dans un autre contexte et du même auteur, La poursuite du bonheur raconte une histoire d’amour à l’époque du maccarthysme.

A suivre ici.

17 mai 2009

La joueuse d'échecs

La joueuse d'échecs, Bertina HENRICHS

Eleni est femme de chambre dans un hôtel de l’île de Naxos. Son quotidien se partage entre son travail, sa famille et son amie d’enfance. Un jour, dans la chambre d’un couple de touristes, elle découvre un échiquier. Etrangement attirée par le jeu, elle va peu à peu en apprendre les règles. Au plaisir de la découverte va se substituer la passion du jeu, au grand dam des habitants de l’île et de son mari.
Un petit livre tout en finesse sur l’émancipation d’une femme dans le décor blanc et bleu des îles grecques.