Mrs Dalloway, de Virginia WOOLF
C'est la lecture des Heures de Michael CUNNINGHAM, bien-sûr, qui m'avait donné l'envie de relire Mrs Dalloway de Virginia WOOLF, un roman qui m'était complètement passé au-dessus de la tête lorsque, adolescente, je le lus pour la première fois. Forte d'une désormais incontestable maturité acquise avec les (quelques) années qui me séparent de mon adolescence, j'entrepris de relire ce roman qui inspira aussi magistralement CUNNINGHAM. Et je compris enfin pourquoi ce roman est considéré comme un roman fondateur de la littérature moderne.
Car moderne, il l'est indéniablement. Tant dans l'écriture résolument novatrice que dans l'histoire elle-même si tant est que l'on puisse parler d'histoire.
Mrs Dalloway s'apprête à donner une soirée. Elle se met donc à faire toutes ces petites charges qui incombent à l'organisation d'une réception : aller chercher les fleurs, repriser une robe... tout en songeant à son passé, au présent et à la mort, thème cher à Virginia WOOLF. L'arrivée inopinée de son amour de jeunesse, Peter Walsch, aventurier imprévisible à qui elle préféra son mari qui lui apporta le confort et une place dans la bonne société, déclenche chez elle toute une panoplie de sentiments, allant de la nostalgie à l'agacement.
Alors que l'on suit les errances de Mrs Dalloway, on croise soudain, au détour d'une rue londonienne, Septimus Warren Smith, ancien soldat de la guerre 14-18, qui ne parvient pas à surmonter ses angoisses et la mort de son ami et qui sombre peu à peu dans la folie. Septimus, que personne ne comprend, ni sa tendre et jeune épouse, ni surtout les médecins qui tentent de l'enfermer dans des hôpitaux psychiatriques et qui ne feront que précipiter la mort de leur patient, finira par se suicider. Clarissa Dalloway entendra la nouvelle lors de sa soirée et plongera alors dans une réflexion émouvante sur la vie pleine de faux-semblant et l'honnêteté du choix d'en finir.
On passe sans transition d'une conscience à l'autre, et on peut lire les pensées éparses de Clarissa, Peter et Septimus dans ce récit qui dure une seule journée dans les rues de Londres. Les descriptions nombreuses et minutieuses sont d'une fulgurante beauté et montre tout l'amour de la vie de Clarissa Dalloway, et sans doute de Virginia WOOLF, tout en laissant clairement apparaître, et c'en est toute la force, l'angoisse et la pulsion de mort qui taraude les personnages et l'auteur.
Clarissa aime la répétition, sa vie rangée, son quotidien mais les deux personnages masculins semblent symboliser sa face cachée : Peter représenterait son envie de liberté et d'exotisme et Septimus son attirance pour la mort et le suicide.
Chaque page est ciselée, c'est époustouflant de finesse et de subtilité, c'est éblouissant de beauté, c'est écrasant de tristesse et de lucidité. On fait bien, quand-même, parfois, de (re)lire ses classiques.
Références :
Virginia WOOLF, Mrs Dalloway, 1925