27 février 2013

(Re)lire ses classiques #9

Mrs Dalloway, de Virginia WOOLF

C'est la lecture des Heures de Michael CUNNINGHAM, bien-sûr, qui m'avait donné l'envie de relire Mrs Dalloway de Virginia WOOLF, un roman qui m'était complètement passé au-dessus de la tête lorsque, adolescente, je le lus pour la première fois. Forte d'une désormais incontestable maturité acquise avec les (quelques) années qui me séparent de mon adolescence, j'entrepris de relire ce roman qui inspira aussi magistralement CUNNINGHAM. Et je compris enfin pourquoi ce roman est considéré comme un roman fondateur de la littérature moderne.
Car moderne, il l'est indéniablement. Tant dans l'écriture résolument novatrice que dans l'histoire elle-même si tant est que l'on puisse parler d'histoire.
Mrs Dalloway s'apprête à donner une soirée. Elle se met donc à faire toutes ces petites charges qui incombent à l'organisation d'une réception : aller chercher les fleurs, repriser une robe... tout en songeant à son passé, au présent et à la mort, thème cher à Virginia WOOLF. L'arrivée inopinée de son amour de jeunesse, Peter Walsch, aventurier imprévisible à qui elle préféra son mari qui lui apporta le confort et une place dans la bonne société, déclenche chez elle toute une panoplie de sentiments, allant de la nostalgie à l'agacement. 
Alors que l'on suit les errances de Mrs Dalloway, on croise soudain, au détour d'une rue londonienne, Septimus Warren Smith, ancien soldat de la guerre 14-18, qui ne parvient pas à surmonter ses angoisses et la mort de son ami et qui sombre peu à peu dans la folie. Septimus, que personne ne comprend, ni sa tendre et jeune épouse, ni surtout les médecins qui tentent de l'enfermer dans des hôpitaux psychiatriques et qui ne feront que précipiter la mort de leur patient, finira par se suicider. Clarissa Dalloway entendra la nouvelle lors de sa soirée et plongera alors dans une réflexion émouvante sur la vie pleine de faux-semblant et l'honnêteté du choix d'en finir.
On passe sans transition d'une conscience à l'autre, et on peut lire les pensées éparses de Clarissa, Peter et Septimus dans ce récit qui dure une seule journée dans les rues de Londres. Les descriptions nombreuses et minutieuses sont d'une fulgurante beauté et montre tout l'amour de la vie de Clarissa Dalloway, et sans doute de Virginia WOOLF, tout en laissant clairement apparaître, et c'en est toute la force, l'angoisse et la pulsion de mort qui taraude les personnages et l'auteur.
Clarissa aime la répétition, sa vie rangée, son quotidien mais les deux personnages masculins semblent symboliser sa face cachée : Peter représenterait son envie de liberté et d'exotisme et Septimus son attirance pour la mort et le suicide.
Chaque page est ciselée, c'est époustouflant de finesse et de subtilité, c'est éblouissant de beauté, c'est écrasant de tristesse et de lucidité. On fait bien, quand-même, parfois, de (re)lire ses classiques.

Références :
Virginia WOOLF, Mrs Dalloway, 1925
 

17 commentaires:

  1. Ouf là oui, quel roman! Abandonné page 1 en français, puis lu intégralement en VO! J'adore l'auteur, maintenant j'en lis un de temps en temps...
    Plus généralement, oui, des classiques doivent et peuvent être lus ou relus. Dans le tas, il y a de quoi trouver son bonheur.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'aurais adoré le lire en VO. Mais je ne suis pas sûre que mon niveau d'anglais me permette de saisir toutes le nuances... Dommage.

      Supprimer
  2. Bien sûr qu'il faut relire les classiques, c'est un tel plaisir à chaque fois ! Jamais lu Virginia Woolf mais je commencerais bien par celui-là^^

    RépondreSupprimer
  3. En lisant ton billet, je me demande si j'ai bien lu le même roman... Je n'en garde pas le souvenir d'un texte aussi riche mais -j'ai un peu honte de l'avouer- plutôt d'une lecture un peu fastidieuse par moments. De toute évidence, il faudrait que je m'y replonge un de ces jours...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Nous aussi, Xavier et moi, avions le souvenir d'une lecture fastidieuse. Et puis on s'y est replongé et une fois qu'on est entré dedans, quelle poésie...
      Cela vaut la peine de persévérer, je pense. Tu nous diras...

      Supprimer
  4. Grâce à Amandine, j'ai persévéré dans la découverte de Woolf et celui-ci est le premier que j'ai lu jusqu'à la fin, avec beaucoup de plaisir.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Quel plaisir de savoir qu'après tant d'années je te fais persévérer moi aussi !

      Supprimer
  5. cela fait partie de ceux pour lesquels je me dis toujours... un jour... il faudrait que je me décide!
    Bonne soirée!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. ça faisait quelques années qu'il traînait dans ma PAL...

      Supprimer
  6. Époustouflant, c'est le mot ! Magnifique livre !

    RépondreSupprimer
  7. Bon, il faudra aussi que je m'y mette!
    Ceci dit, Woolf n'est pas complètement absente de mes lectures: je me souviens avoir dit un texte magnifique pour le concours de dernière année de déclamation, il faudrait que je le retrouve... (ainsi que d'autres que j'adorerais redire à l'occasion, en particulier des textes qui parlent de femmes, dont un extrait du Bel indifférent de Cocteau, par exemple).

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ses textes sur les femmes sont eux aussi résolument modernes ! Je pense à Une chambre à soi. Quel plaidoyer pour les femmes !

      Supprimer
    2. C'est effectivement un extrait d'Une chambre à soi que j'avais travaillé pour ce concours

      Supprimer
  8. J'ai déjà essayé deux fois, en plusieurs années, et je n'ai jamais passé quelques pages. Je tiens absolument à le lire en vo et pourtant, je crois que je devrais me résoudre à lire la traduction française car la langue anglaise de l'époque, pourtant si belle, a plutôt l'air de faire barrage !!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Moi je n'aurais pas osé m'attaquer à la VO. Surtout que avec toutes les subtilités langagières de Woolf... mais c'est vrai que c'est tentant.

      Supprimer