14 novembre 2009

Sic transit gloria mundi*

Gloire, Daniel KEHLMANN

Neuf histoires fantaisistes sur l'air du temps et notre besoin d'ailleurs: une réussite.

Le téléphone portable : manière d’être ici et ailleurs, toujours présent, connecté au monde, de s’assurer de la présence des autres, de leur raconter des mensonges et, dans les cas extrêmes, d’appeler au secours. Un objet ordinaire aux possibilités infinies, qui est aussi l’un des nombreux fils conducteurs de ce roman en neuf histoires.

Nous avons déjà parlé de Daniel KEHLMANN ici et Gloire, dernier opus du jeune surdoué des lettres allemandes, amuse et étonne tant il se distingue de son roman précédent (où il était aussi question de gloire, mais là chez deux grands scientifiques du 18ème siècle). Derrière le titre, assez ironique pour celui qui en très peu de temps est devenu une célébrité du milieu littéraire international, des histoires où se croisent une star de cinéma, des auteurs à succès ou des employés de bureau qui, par hasard ou par envie, brisent leur quotidien. Comme ce cadre qui, grâce à son portable justement, peut entretenir une double vie ou cet homme ordinaire qui découvre que son nouveau numéro de téléphone est aussi celui d’un autre.
Le réel et le virtuel sont souvent proches et les personnages d’écrivains qui jalonnent le livre en sont la preuve. Qui mieux qu’eux peut sans cesse mélanger fiction et réalité, réécrire l’histoire et intervenir dans la vie de leurs personnages, au point de pouvoir les sauver d’une mort annoncée.
L’écrivain semble tanguer sur un fil entre la vie et l’œuvre. Prenons par exemple Miguel Auristos Blancos, auteur brésilien de best-sellers de prêt-à-penser spirituel comme Le Chemin du moi vers son moi, Interroge l’univers il parlera, … (Paulo Coehlo aura du mal à ne pas s’y reconnaître…). Parvenu au sommet de son art et de ses ventes, il se rend brutalement compte de l’état du monde et de l’absurdité de la condition humaine. Parviendra-t-il à continuer à se mentir ou prendra-t-il les décisions qui s’imposent à lui ?
Et cette auteur de polar embarquée dans un voyage organisé hilarant dans une ancienne république soviétique d’Asie centrale : saura-t-elle faire face à la vie sans la langue et sans les mots ?

Le livre est difficile à résumer mais on peut dire qu’en mélangeant tous ces thèmes, KHELMANN parvient brillamment à dresser, dans un style enlevé et direct, un portrait plein d’ironie (et jamais cynique) de notre société tout en s’interrogeant sur l’univers de la création et celui de l’écrivain. Chaque texte est une nouvelle qui pourrait se lire indépendamment des autres mais elles sont toutes reliées par des détails, des clins d’oeil qu’il serait dommage de louper.
Un grand plaisir de lecture et un auteur à suivre…

Niveau 3

* Ainsi passe la gloire du monde

Mise à jour du 14/06/2010:
A voir aussi, la premier roman de KHELMANN: La Nuit de l'illusionniste.

1 commentaire:

  1. Tout à fait d'accord, Gloire est très réussi et je suis prête aussi à suivre cet auteur dans ses futures publications...

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