Troisièmes noces, Tom LANOYE
Un mariage blanc pour un misanthrope. Un roman en prise avec son temps, drôle, grinçant et tragique. Le Lanoye nouveau est arrivé.
Marteen, la cinquantaine, se remet difficilement de la lente agonie et de la mort de son grand amour, Gaétan. Rongé lui-même par une maladie incurable, il hante une maison vidée de la présence de l’autre, trop pleine d’objets et de souvenirs accumulés au fil des ans. Pour cet homme habitué aux plateaux de cinéma et au langage de l’image, chaque bribe de passé est une scène, avec cadrage, lumière et bande-son.
Mais son petit film intérieur ne suffit plus à rendre son existence supportable et c’est dans un instant d’inconscience (ou de désespoir ?) qu’il accepte une proposition casse-gueule : contracter un mariage blanc.
Il doit épouser, contre un sacré paquet d’argent, Tamara, la petite amie africaine de Norbet Vandessel. Une histoire de quelques mois, le temps qu’elle obtienne papiers et nationalité et qu’elle puisse ensuite vivre pleinement son amour avec Vandessel.
Le quotidien de Marteen, peu porté sur l’empathie et la compagnie de ses semblables, est chamboulé par l’arrivée de cette jeune fille fière, têtue, sans gêne mais dont la présence le force à quitter sa peau d’ours.
Là où l’on pourrait craindre une histoire pleine de bons sentiments (un homme en fin de vie réveillé par la présence d’une jeune fille qui le fera sortir de sa coquille… on dirait un scénario de film français…), Tom Lanoye compose une tragi-comédie qui s’inscrit avec force dans le monde d’aujourd’hui. Un pays (c’est la Belgique mais cela pourrait être partout en Europe) renfermé sur lui-même, où l’étranger est avant tout un suspect qu’il convient de ramener fissa à la frontière, après avoir fouillé sans état d’âme dans ce qu’il a de plus intime. Bien que les inspecteurs chargés d’enquêter sur le bien-fondé de leur union compose un duo du plus haut comique, l’humour est surtout grinçant. Comme lorsqu’il est question d’évoquer la vieillesse, la déchéance des corps, le racisme ordinaire ou encore la violence des rapports sociaux.
On retrouve à nouveau le style de l’auteur (dont on a souvent parlé), son goût pour les détours, pour les chutes abruptes et les changements de tons. À l’image de son personnage :
Moi, c’est de la jérémiade que je suis le champion. Et de l’exagération. L’hyperbole est toute l’histoire de ma vie. Remuer crûment un couteau dans une plaie, ça je le fais aussi. Ou alors je prends tout bonnement la fuite. Au milieu de la nuit. Je peux aussi laisser crever quelqu’un, sans plus.
Dans ce troisième roman traduit en français, la langue de l’auteur flamand se fait plus crûe. Qu’il parle du nettoyage d’un dentier ou de la couleur du sexe de Marteen après avoir été rué de coups (âmes sensibles s’abstenir…). Contrairement à Magritte, chez Lanoye, une pipe est une pipe… (notamment dans une scène où l’on apprendra au passage le mot flamand balzak, qui n’a aucun rapport avec l’écrivain français… je vous laisse deviner…).
Lyrique, hyperbolique, scatologique, parfois même carrément grotesque mais, et c’est ce qui étonne toujours chez l’auteur, terriblement touchant. Sarcastique et, dans ce roman plus que dans les précédents, tragique.
Un extrait à lire sur le site de l’auteur.
Référence :
Troisièmes noces, Tom LANOYE, traduit du néerlandais (Belgique) par Alain van Crugten, Éditions de La Différence, 2014.
Un mariage blanc pour un misanthrope. Un roman en prise avec son temps, drôle, grinçant et tragique. Le Lanoye nouveau est arrivé.
Marteen, la cinquantaine, se remet difficilement de la lente agonie et de la mort de son grand amour, Gaétan. Rongé lui-même par une maladie incurable, il hante une maison vidée de la présence de l’autre, trop pleine d’objets et de souvenirs accumulés au fil des ans. Pour cet homme habitué aux plateaux de cinéma et au langage de l’image, chaque bribe de passé est une scène, avec cadrage, lumière et bande-son.
Mais son petit film intérieur ne suffit plus à rendre son existence supportable et c’est dans un instant d’inconscience (ou de désespoir ?) qu’il accepte une proposition casse-gueule : contracter un mariage blanc.
Il doit épouser, contre un sacré paquet d’argent, Tamara, la petite amie africaine de Norbet Vandessel. Une histoire de quelques mois, le temps qu’elle obtienne papiers et nationalité et qu’elle puisse ensuite vivre pleinement son amour avec Vandessel.
Le quotidien de Marteen, peu porté sur l’empathie et la compagnie de ses semblables, est chamboulé par l’arrivée de cette jeune fille fière, têtue, sans gêne mais dont la présence le force à quitter sa peau d’ours.
Là où l’on pourrait craindre une histoire pleine de bons sentiments (un homme en fin de vie réveillé par la présence d’une jeune fille qui le fera sortir de sa coquille… on dirait un scénario de film français…), Tom Lanoye compose une tragi-comédie qui s’inscrit avec force dans le monde d’aujourd’hui. Un pays (c’est la Belgique mais cela pourrait être partout en Europe) renfermé sur lui-même, où l’étranger est avant tout un suspect qu’il convient de ramener fissa à la frontière, après avoir fouillé sans état d’âme dans ce qu’il a de plus intime. Bien que les inspecteurs chargés d’enquêter sur le bien-fondé de leur union compose un duo du plus haut comique, l’humour est surtout grinçant. Comme lorsqu’il est question d’évoquer la vieillesse, la déchéance des corps, le racisme ordinaire ou encore la violence des rapports sociaux.
On retrouve à nouveau le style de l’auteur (dont on a souvent parlé), son goût pour les détours, pour les chutes abruptes et les changements de tons. À l’image de son personnage :
Moi, c’est de la jérémiade que je suis le champion. Et de l’exagération. L’hyperbole est toute l’histoire de ma vie. Remuer crûment un couteau dans une plaie, ça je le fais aussi. Ou alors je prends tout bonnement la fuite. Au milieu de la nuit. Je peux aussi laisser crever quelqu’un, sans plus.
Dans ce troisième roman traduit en français, la langue de l’auteur flamand se fait plus crûe. Qu’il parle du nettoyage d’un dentier ou de la couleur du sexe de Marteen après avoir été rué de coups (âmes sensibles s’abstenir…). Contrairement à Magritte, chez Lanoye, une pipe est une pipe… (notamment dans une scène où l’on apprendra au passage le mot flamand balzak, qui n’a aucun rapport avec l’écrivain français… je vous laisse deviner…).
Lyrique, hyperbolique, scatologique, parfois même carrément grotesque mais, et c’est ce qui étonne toujours chez l’auteur, terriblement touchant. Sarcastique et, dans ce roman plus que dans les précédents, tragique.
Un extrait à lire sur le site de l’auteur.
Référence :
Troisièmes noces, Tom LANOYE, traduit du néerlandais (Belgique) par Alain van Crugten, Éditions de La Différence, 2014.
Un nouveau Tom Lanoye, c'est une bonne nouvelle, et les thématiques de celui-ci m'attirent. Mais je dois encore lire Les boîtes en carton...
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