Code 1879 — Les Enquêtes du généalogiste, Dan WADELL
Le Linguiste était presque parfait, David CARKEET
Deux enquêtes policières avec, pour héros, deux non-policiers. Entre le généalogiste et le linguiste, mon cœur ne risquait pas de balancer…
L’inspecteur de police a depuis quelque temps déserté son poste. Dans les séries télé, on ne compte plus les exemples d’auxiliaires qui volent la vedette au flic : expert scientifique, mentaliste, archéologue, psy, … Le renouvellement du genre passe par un changement de casting. Et en littérature ? Adamsberg, Wallander, Erlendur, Fors (pour ne citer que les plus récents) devraient-ils craindre la concurrence ? Petit comparatif à partir de deux romans qui jouent (ou pas) la carte de l’originalité.
L’inspecteur londonien Grant Foster se retrouve avec un drôle de cadavre sur les bras : un homme poignardé, amputé des deux mains et sur le corps duquel apparaissent, gravées au couteau, d’étranges inscriptions. Afin d’éclaircir cette énigme, Forster fait appel aux services d’un généalogiste, plus habitué aux rayonnages des bibliothèques qu’aux scènes de crime. Rapidement, l’enquête fait remonter à la surface une autre affaire criminelle : une série de meurtres datant de 1879 qui entretient d’étranges points communs avec le présent.
Des meurtres, des indices qui s’accumulent, quelques fausses pistes et un brin de romance : rien de très original dans ce polar qui tente de recréer l’ambiance mystérieuse du Londres de la fin du 19ème siècle. Cimetières, ruelles obscures, bas-fonds, … : tous les clichés sont au rendez-vous. L’élément original étant ici la présence du généalogiste qui, en fouillant dans les registres et les journaux de l’époque, éclaire le présent en replongeant dans le passé. La formule est d’ailleurs déclinée et répétée toutes les vingt pages, pour ceux qui n’auraient pas bien saisi le concept… Pour le reste, le style est plat et on devine assez vite l’issue de l’enquête (alors que je suis d'habitude le dernier à comprendre!). Je ferai donc l’impasse sur la suite des aventures du généalogiste (parue également chez Babel noir).
Autrement plus stimulant, Le Linguiste était presque parfait de David Carkeet parvient à conjuguer humour et suspense, tout en dressant une satire du monde de la recherche en sciences humaines.
Le Linguiste était presque parfait, David CARKEET
Deux enquêtes policières avec, pour héros, deux non-policiers. Entre le généalogiste et le linguiste, mon cœur ne risquait pas de balancer…
L’inspecteur de police a depuis quelque temps déserté son poste. Dans les séries télé, on ne compte plus les exemples d’auxiliaires qui volent la vedette au flic : expert scientifique, mentaliste, archéologue, psy, … Le renouvellement du genre passe par un changement de casting. Et en littérature ? Adamsberg, Wallander, Erlendur, Fors (pour ne citer que les plus récents) devraient-ils craindre la concurrence ? Petit comparatif à partir de deux romans qui jouent (ou pas) la carte de l’originalité.
L’inspecteur londonien Grant Foster se retrouve avec un drôle de cadavre sur les bras : un homme poignardé, amputé des deux mains et sur le corps duquel apparaissent, gravées au couteau, d’étranges inscriptions. Afin d’éclaircir cette énigme, Forster fait appel aux services d’un généalogiste, plus habitué aux rayonnages des bibliothèques qu’aux scènes de crime. Rapidement, l’enquête fait remonter à la surface une autre affaire criminelle : une série de meurtres datant de 1879 qui entretient d’étranges points communs avec le présent.
Des meurtres, des indices qui s’accumulent, quelques fausses pistes et un brin de romance : rien de très original dans ce polar qui tente de recréer l’ambiance mystérieuse du Londres de la fin du 19ème siècle. Cimetières, ruelles obscures, bas-fonds, … : tous les clichés sont au rendez-vous. L’élément original étant ici la présence du généalogiste qui, en fouillant dans les registres et les journaux de l’époque, éclaire le présent en replongeant dans le passé. La formule est d’ailleurs déclinée et répétée toutes les vingt pages, pour ceux qui n’auraient pas bien saisi le concept… Pour le reste, le style est plat et on devine assez vite l’issue de l’enquête (alors que je suis d'habitude le dernier à comprendre!). Je ferai donc l’impasse sur la suite des aventures du généalogiste (parue également chez Babel noir).
Autrement plus stimulant, Le Linguiste était presque parfait de David Carkeet parvient à conjuguer humour et suspense, tout en dressant une satire du monde de la recherche en sciences humaines.
Jeremy Cook étudie l’acquisition du langage chez les jeunes enfants au sein de l’équipe de chercheurs en linguistique de l’institut Warbach, dans le sud de l’Indiana. Célibataire, passablement peu sûr de lui, plus proche de l’ours que de l’humain, il se demande ce qui lui a valu d’être traité de « trou du cul » par une jeune assistante du centre :
La formule initiale avait peut-être été « un vrai trou-du-cul », et le souvenir de Paula avait altéré la formulation originale en un « parfait trou-du-cul ». À moins que la sentence de départ ait été « une espèce de trou-du-cul » ou « un peu trou-du-cul sur les bords » ou « pas trop trou-du-cul » voire peut-être « pas un trou du cul contrairement aux autres ». […] Au yeux de quelqu’un à l’institut, il était un parfait — ou un vrai, un pauvre, un putain de, etc. — trou-du-cul, et cette personne en parlait à d’autres qui, à leur tour, le considéraient également comme (ou un vrai, un pauvre, etc.) trou-du-cul qui foirait tout.
Le meurtre étrange de l’un de ses collègues va cependant l’obliger à se concentrer sur un sujet hautement plus inquiétant : lequel des linguistes de l’institut est un assassin ?
Entre Agatha Christie et David Lodge, David Carkeet s’amuse avec le microcosme qu’il passe sous sa loupe pour mette en lumière les petits jeux de pouvoir, de solidarité et d’inimitié qui se nouent au sein de ce « tout petit monde ». Chaque personnage est un concentré de névroses, voire de folie : le directeur procédurier, les chercheurs inadaptés à la vie en société, le flic intello aux méthodes peu orthodoxes, … L’auteur parvient assez adroitement à mettre son personnage de linguiste à contribution et à utiliser, avec beaucoup de second degré, ses connaissances afin de résoudre l’enquête. Ce qui, pour quelqu’un qui passe son temps à modéliser les « areuhareuh » des nourrissons n’était pas gagné d’avance…
La formule initiale avait peut-être été « un vrai trou-du-cul », et le souvenir de Paula avait altéré la formulation originale en un « parfait trou-du-cul ». À moins que la sentence de départ ait été « une espèce de trou-du-cul » ou « un peu trou-du-cul sur les bords » ou « pas trop trou-du-cul » voire peut-être « pas un trou du cul contrairement aux autres ». […] Au yeux de quelqu’un à l’institut, il était un parfait — ou un vrai, un pauvre, un putain de, etc. — trou-du-cul, et cette personne en parlait à d’autres qui, à leur tour, le considéraient également comme (ou un vrai, un pauvre, etc.) trou-du-cul qui foirait tout.
Le meurtre étrange de l’un de ses collègues va cependant l’obliger à se concentrer sur un sujet hautement plus inquiétant : lequel des linguistes de l’institut est un assassin ?
Entre Agatha Christie et David Lodge, David Carkeet s’amuse avec le microcosme qu’il passe sous sa loupe pour mette en lumière les petits jeux de pouvoir, de solidarité et d’inimitié qui se nouent au sein de ce « tout petit monde ». Chaque personnage est un concentré de névroses, voire de folie : le directeur procédurier, les chercheurs inadaptés à la vie en société, le flic intello aux méthodes peu orthodoxes, … L’auteur parvient assez adroitement à mettre son personnage de linguiste à contribution et à utiliser, avec beaucoup de second degré, ses connaissances afin de résoudre l’enquête. Ce qui, pour quelqu’un qui passe son temps à modéliser les « areuhareuh » des nourrissons n’était pas gagné d’avance…
Deuxième découverte d’un roman sorti de chez Monsieur Toussaint (après Karoo) et deuxième excellente surprise, avec à nouveau un vrai plaisir lié aussi à l’objet-livre soigné et élégant.
Référence :
Dan WADELL, Code 1879 — Les Enquêtes du généalogiste, traduit de l’anglais (Grande-Bretagne) par Jean-René Dastugue, Babel noir, 2012. (Niveau 1)
David CARKEET, Le Linguiste était presque parfait, traduit de l’anglais (États-Unis) par Nicolas Richard, Monsieur Toussaint Louverture, 2013. (Niveau 3)
Référence :
Dan WADELL, Code 1879 — Les Enquêtes du généalogiste, traduit de l’anglais (Grande-Bretagne) par Jean-René Dastugue, Babel noir, 2012. (Niveau 1)
David CARKEET, Le Linguiste était presque parfait, traduit de l’anglais (États-Unis) par Nicolas Richard, Monsieur Toussaint Louverture, 2013. (Niveau 3)
Le premier est assez classique et m'a bien plu, j'ai aimé l'ambiance. Je ne connais pas le second qui est aussi très tentant car plus original.
RépondreSupprimerWadell est assez classique, c'est vrai, mais il m'a semblé surtout terriblement convenu. Ce qui n'est pas le cas du deuxième!
SupprimerLe second est bien tentant, en effet, tant par le texte lui-même que par la caution de l'éditeur...
RépondreSupprimerEffectivement. Et puis quel beau livre!
SupprimerPS: et c'est en fait un cadeau pour mon linguiste de mari qui le lira en vacances, comme la grande majorité de ses collègues ;-)
SupprimerJ'ai lu les 2 Waddel et j'ai bien aimé (surtout le premier). Pour le Carkeet, je suis contente de lire votre commentaire, car je l'ai vu en librairie et me demandais ce que ça vaut. Je sais maintenant à quoi m'en tenir et je risque bien de me laisser tenter.
RépondreSupprimerComme le disais ICB ici au-dessus, la caution de l'éditeur était un argument quand j'ai vu le bouquin.
SupprimerMoi aussi j'ai bien aimé Waddel. Classique mais efficace je trouve.
RépondreSupprimerGrosse déception de mon côté. J'avais l'impression de lire une série télé...
SupprimerJ'aimais bien Waddel aussi mais j'aime assez les policiers qui plongent dans l'Angleterre victorienne. Pas des chefs-d'oeuvre mais distrayants. Le second me tente beaucoup...
RépondreSupprimerLe second est vraiment un bon choix pour les vacances!
SupprimerA priori, je serais plus intéressée par le deuxième... quoique la généalogie peut donner lieu à des enquêtes intéressantes, sauf que ça n'a pas l'air d'être trop le cas ici.
RépondreSupprimerComme tu le vois dans les commentaires, les autres avis sont plus enthousiastes que le mien.
SupprimerBonjour, j'ai énormément aimé le premier roman, j'adore tout ce qui se rapporte à la généalogie, j'ai la suite dans ma PAL, quant au second, je l'ai noté et ce billet donne encore plus envie. Bonne après-midi.
RépondreSupprimerSans doute suis-je entrainée par mon amour de la généalogie. Pas un chef d'oeuvre, mais une lecture plaisante, et j'aimerais lire la suite;
RépondreSupprimerPour le Carkeet, je ne me suis pas intéressée à l'intrigue policière (et si tu sais pourquoi le deuxième mort, je serais contente de le savoir) mais j'ai adoré le mboui révélateur. Un deuxième est paru, il semble que ce ne soit pas une série policière, alors mon intérêt est renouvelé.