14 juin 2010

Y a un truc

La Nuit de l’illusionniste, Daniel KEHLMANN

La confession d’un prodige de l’illusionnisme, entre rêve et réalité.

Au départ, il n’y avait rien. Ou alors juste des couleurs. Mais peut-on croire les premiers souvenirs du nourrisson dans une mémoire recomposée ? Déjà là, dans cette tentative un peu illusoire de reconstituer sa genèse, la réalité semble s’effacer devant le rêve éveillé de celui qui raconte.
L’enfance d’Arthur Beerholm est marquée par une disparition digne des plus grands tours de magie : l’évanouissement total de sa mère adoptive, frappée par la foudre. Faut-il y voir un coup du hasard ou la main de dieu ? Par la suite, la découverte de la beauté parfaite des mathématiques amènera Arthur vers la prêtrise et la théologie. Vocation ? Non, car sa véritable passion le rattrape un soir devant le spectacle d’un illusionniste. Il sera magicien, le plus grand de tous, le plus virtuose, adulé et inquiétant. Celui qui, oubliant les trucs et les ficelles, donne la parfaite illusion d’un pouvoir qui défie l’entendement. Succès et gloire jusqu’au jour où le magicien se découvre un pouvoir insoupçonné…
La confession d’Arthur est celle d’un homme qui se joue de la réalité et qui, comme un romancier (ce que sous-entend la très belle couverture du livre), mélange dans son récit faits avérés et visions, illuminations sublimes qui, au fil du roman, finissent par faire douter le lecteur. Arthur s’adresse-t-il à un interlocuteur réel, absent, rêvé ? Où trouver la vérité dans un monde d’illusions ?
La Nuit de l’illusionniste est le premier roman de celui que les médias ont pris l’habitude d’appeler « le jeune prodige de la littérature allemande », écrit en 1997 et revu en 2007. On y retrouve le destin d’une personnalité hors norme et géniale, comme dans Les arpenteurs du monde. Arthur disparaît derrière son talent et sa vocation et se construit un univers coupé du monde des humains.
Le récit est parcouru de réflexions philosophiques sur la mémoire, dieu, la perception, la création, … et c’est pas à pas que l’intrigue avance, au gré des illusions, vers les toutes dernières révélations. La construction est impeccable, maîtrisée, mais il manque parfois de distance, de quoi s’accrocher un peu plus au personnage. Plus on avance dans le roman, plus la différence entre le rêve et le réel tend à s’estomper, ce qui parfois lasse un peu. Pêché de jeunesse ?
Du même auteur, rappelons donc Les arpenteurs du monde mais aussi Gloire, que nous avions beaucoup aimé.

6 commentaires:

  1. Après mon coup de coeur pour Les arpenteurs du monde, je me suis promise de relire très vite cet auteur. J'ai Gloire dans ma PAL depuis sa sortie, il faut vraiment que je lui fasse une petite place vers le sommet. Je garde la Nuit de l'illusionniste pour plus tard.

    RépondreSupprimer
  2. J'ai eu l'occasion de lire que cet auteur en avait réconcilié avec la littérature allemande.
    Depuis le temps qu'on parle de lui, j'ai enregistré son nom. Mais je suis très peu tentée par le sujet des arpenteurs du monde, dérangée par Gloire parce qu'il s'agit de nouvelles... et encore sceptique quant au thème de celui-ci. Néanmoins déjà plus encline à l'acquérir que les deux précédents, je le note et guetterai dès l'année écoulée sa parution en poche. Merci pour la découverte !

    RépondreSupprimer
  3. @ zarline: excellentes idées.

    @ Reka: à choisir, je conseille davantage "Gloire". Et, pour te convaincre, je dirai que les nouvelles se croisent. Je ne suis pas du tout un lecteur de nouvelles et pourtant j'ai bien accroché.

    RépondreSupprimer
  4. Tiens, mon commentaire n'a pas été publié, disparu dans les limbes numériques.
    Ce que je disais se résume en fait en peu de choses : il va enfin falloir que je me penche sur le cas Kehlmann (même si l'horrible couverture de Gloire m'en a dégoûté jusque-là).
    (Finalement, vu la portée hautement constructive de ce commentaire, il aurait pu tout aussi bien rester dans le néant technologique!)

    RépondreSupprimer
  5. @ ICB: tu as un très mauvais feeling avec les ordis pour le moment... Et oui! il faut se pencher sur Kehlmann. Moins celui-ci peut-être. Et tu peux toujours recouvrir "Gloire" avec une photo de ta star préférée...

    RépondreSupprimer
  6. @ ICB et V&C: la couverture de la nuit de l'illusionniste est beaucoup plus sympa. Ma coéquipière avait aussi aimé le bouquin
    http://www.leglobelecteur.fr/index.php?post/2010/06/12/Daniel-Kehlmann-La-nuit-de-l-illusionniste

    du coup, elle lit "gloire". :)
    belles lectures !

    RépondreSupprimer