On a tous quelque chose en nous de Paul Auster…

Et pourtant le roman débute en Floride où Milles, jeune adulte, vivote au gré des petits boulots, le dernier en date consistant à vider les maisons que les victimes de la crise financière ont du abandonner. Exilé volontaire depuis plusieurs années, il a fui ses parents sans plus donner de nouvelles et porte, comme on dit dans ces cas-là, un lourd secret. Mais le hasard – autre outil de la panoplie austerienne – le ramènera vers Brooklyn, à Sunset Park, où un ami d’enfance s’est installé dans une maison laissée à l’abandon. Un squat assez confortable où Milles fera la rencontre de colocataires qui, eux aussi, semblent avoir mis leur vie sur pause. Les récits de chacun de ces personnages vont se croiser et donner vie à un petit monde dont on a du mal à s’échapper.
Dans Brooklyn Follies, les personnages rêvaient d’un lieu idéal, un endroit où réaliser leurs désirs : l’Hôtel Existence. Dans Sunset Park, les habitants de la maison abandonnée, unissant leurs forces contre une adversité aux formes diverses, semblent aussi vouloir croire en leurs rêves : devenir artiste, maintenir le passé en vie, trouver l’amour. Utopie ? À voir…
Sans avoir l’air d’y toucher, l’auteur montre aussi comment la crise financière affecte le réel. Des maisons à l’abandon, des objets au rebut, des éditeurs aux abois, … Mais Paul (depuis les années, j’ai bien le droit de l’appeler par son petit nom) fonctionne par petites touches, par un jeu subtil d’éléments qui se répondent et créent la trame narrative de son roman. Les digressions, les réflexions sur l’art, les coïncidences, … Un air familier mais qui parvient malgré tout à étonner et à espérer voir arriver le prochain roman le plus vite possible.
Référence :
Paul AUSTER, Sunset Park, Henry Holt, 2010