Notre pays se déchire, nous n’avons plus de gouvernement depuis… heu… on ne compte même plus les mois, il n’est question que de conflits communautaires dans les journaux télévisés… Que cela ne nous empêche pas de développer, quand bon nous semble, un petit sentiment nationaliste et de défendre des livres bien de chez nous, pour les faire découvrir à nos lecteurs d’un autre pays ou à nos compatriotes pas toujours au courant que nous aussi, les Belges, on écrit, et parfois très bien. Un peu de tout, pas du brol : un melting pot !
- Des romans intimistes
Qui dit intimiste, dit Corinne HOEX. La romancière parle d’elle, de son enfance, de ses blessures. Dans Ma robe n’est pas froissée, elle abordait l’adolescence à travers le personnage d’une jeune fille coincée entre une mère indifférente, un père manipulateur et un petit ami violent. Dans son dernier roman, Décidemment je t’assassine, l’auteure évoque sa mère. Ou plutôt les derniers moments de la vie de sa mère, la manière dont elle va la suivre jusqu’à son dernier souffle et surtout dont elle va gérer le deuil de cette femme froide, souvent cassante, parfois violente, qui maintenait sa fille à distance mais n’était jamais loin.
Maman Jeanne, le dernier récit de Daniel CHARNEUX, est lui aussi un petit roman intimiste tout en finesse qui raconte la vie douloureuse d’une femme du peuple au début du siècle, toujours obligée de dépendre des hommes, qui deviendra bonne du curée et évoquera la difficulté, pour une femme de sa condition, de s’en sortir seule et de parvenir à devenir une vraie mère pour des enfants qu’elle n’arrive pas à nourrir.
Dans Oubliez Adam Weinberger, Vincent ENGEL raconte les camps de concentration… ou plutôt ne les raconte pas mais parle de la vie d’Adam Weinberger avant et après cette expérience irracontable. Difficile ensuite de l’oublier.
Intimiste toujours, Ceux qui marchent dans les villes, de Jean-François DAUVEN, roman sur une poignée d’individus perdus dans une grande ville, des villes qui seront, elles aussi, des personnages. Paris, Rome, Londres,… et Bruxelles, bien sûr, autant de villes que d’histoires qui finissent par se répondre. Si la balade dans laquelle DAUVEN nous emmène est parfois un peu longue, la description des villes et des individus ne manque pas de charme.
- Des romans à suspense
On compare souvent Armel JOB à SIMENON. Il est vrai que ses polars sont comme ceux du maître liégeois, des romans psychologiques avant d’être des romans à suspense. Dans Les Fausses innocences, déjà, JOB reconstituait l’ambiance trouble de l’après guerre dans les cantons rédimés (partie de la Belgique du côté de la frontière allemande) et nous faisait nous intéresser à l’étrange personnalité du narrateur, de sa mère tyrannique et de la femme qu’il continue d’aimer malgré qu’il la soupçonne d’avoir bel et bien tué son mari. Dans son dernier roman, Tu ne jugeras point, où il est question de la disparition d’un bébé, le point du vue est celui du juge qui dirige l’affaire, qui soupçonne la mère et cherche à connaître la vérité sans porter de jugement. Roman haletant qui évite subtilement de tomber dans le glauque, le tapageur ou le mélodramatique.
Citons également Jean-Baptiste BARONIAN, auteur « spécialisé » dans le polar et le fantastique (il n’est pas Belge pour rien…) qui a publié une quarantaine de romans (mais aussi une excellente biographie de BAUDELAIRE) dont le très noir Matricide dans lequel un policier de quartier qui s’ennuie assassine sur un coup de tête une pauvre petite vieille.
Et puisque nous sommes pour une Belgique unie, rappelons que nous avions déjà parlé ici d’un grand auteur flamand de roman policier, à savoir Pieter ASPE.
- Des romans historiques
C’est à l’histoire de Rabelais que s’est intéressée Valérie DE CHANGY dans son roman Fils de Rabelais. La romancière y raconte un épisode de la vie du grand écrivain humaniste par l’intermédiaire d’un hypothétique fils adoptif. Nous sommes à la fin de la Renaissance, en pleine guerre de religion, période pendant laquelle il n’est plus aussi aisé de dire ce que l’on pense, même par le rire, et où Rabelais commence à s’inquiéter de la réaction que pourrait susciter la publication de son dernier ouvrage, Le Tiers Livre.
- Des romans d’anticipation
Bernard QUIRIGNY est un jeune auteur à suivre et à saluer pour deux raisons évidentes : son roman Les assoiffées (dont nous avons parlé ici) est un excellent mélange de contre-utopie et d’humour mais aussi (surtout ?) il aura permis aux accros de la rentrée littéraire, qui lui ont accordé pas mal d’attention, de découvrir que, non, il n’y a pas qu’Amélie Nothomb qui écrit en Belgique…
Vincent ENGEL, quant à lui, nous suggère dans Mon voisin c’est quelqu’un de faire bien attention aux agissements de nos voisins. Celui d’Otto, narrateur de cette histoire, est déjà effrayant à première vue. Quand ensuite on se rend compte du plan machiavélique qu’il a mis en place pour faire valoir ses idées radicales et nauséabondes et faire revivre un triste passé, on décide de redoubler de vigilance par rapport à notre voisinage. ENGEL n’a rien n’inventé en terme de roman d’anticipation mais on aime son style dynamique et caustique et puis il est des souvenirs qu’il est toujours bon de rappeler…
A lire qu’il drache ou qu’il neige, un paquet de frites brûlant ou une bonne gauf’ entre les mains, attablé devant une bonne pintje,… qui sait si vous n’aurez pas un sacré boentje pour un de ces auteurs !
PS :
- Des livres du plat pays… une fois #1 c’est ici.
- Comme nous sommes nuls en challenge, nous n’avons pas participé à celui organisé par Reka sur la littérature belge. Pourtant nous aurions facilement gagné le titre de « gros Belge » !
- On profite de ce billet pour ajouter un titre à la playlist de Leiloona, bienheureuse créatrice de la radio des blogueurs. Un titre belge, bien entendu !
Très chouette initiative!
RépondreSupprimerEn effet, vous auriez mérité bien mieux qu'un titre de Gros Belge ;)
"Décidément je t'assassine" m'interpelle :
"la manière dont elle va la suivre jusqu’à son dernier souffle et surtout dont elle va gérer le deuil de cette femme froide, souvent cassante, parfois violente, qui maintenait sa fille à distance mais n’était jamais loin."
Voilà qui me fait fichtrement penser à "La voyageuse de nuit" de Françoise Chandernagor. Un livre qui est resté intact dans ma mémoire, et que j'avais beaucoup aimé.
Honte à moi peut-être, c'est la première fois que je lis ce nom (et plusieurs autres dans l'article aussi, mais ne remuons pas le couteau, les limites de ma connaissance me sont intolérables (si!)) : Corinne Hoex. La trame que tu décris me donne faim, je note donc ! Merci :)
Bonsoir,
RépondreSupprimerQuelques petits commentaires:
1. Tu peux ranger le dernier Engel, Le Mariage de Dominique Hardenne aussi dans la SF, de même que La grande nuit d'Adamek;
2. sur la mort de la mère: Nicole Malinconi,Nous deux et J. Harpman, La fille démantelée (extraits dans un certain manuel de littérature belge trop connu mais il parait que la faute d'orthographe sur la photo de couverture est rédhibitoire pour les profs)
3. Et puisqu'hier c'était la journée contre le Sida: Cargo vie de Pascal De Duve.
Bonnes lectures et bravo à Reka
Lapsus dans le commentaire précédent: "pas trop connu" (je prends mes rêves pour la réalité!)
RépondreSupprimerCa me rappelle qu'il est temps que j'entame mon challenge sur la littérature belge ! ;-)
RépondreSupprimerJe note ! Je connais très peu (voire pas du tout) la littérature belge, alors que je suis frontalière... c'est donc une lacune...
RépondreSupprimerJe crée un lien pour mon défi "Voisins voisines", qui nous permettra de piocher ici des idées ! Merci !
RépondreSupprimerArgll je n'ai pas trouvé la chanson que tu as postée sur deeezer ... du coup je me suis rabattue sur une autre chanson du même groupe : dis-moi si cela te convient.
RépondreSupprimerJ'ai mis "crazy to love".
Désolée. :/
@ Reka: heureux de t'avoir fait découvrir un auteur.
RépondreSupprimer@ Françoise: merci pour les infos. Et, pour notre part, le "certain manuel" en question nous a déjà fourni pas mal de bonnes idées.
@ Lukes: tu as déjà des idées d'auteurs/titres?
@ Kathel: merci pour le lien, voisine!
@ Leiloona: je cherche une autre idée et je la poste sur ta page.
Super cette série de livres belges ! Plein de bonnes idées, on ne sait pas par quoi commencer... et surtout quand ! (dis donc, c'est que ça fait longtemps que je n'ai pas écrit une vraie chronique...)
RépondreSupprimerptit bonjour en passant, bon dimanche !
Pas vraiment d'idées pour le challenge, non. Mais Reka en avait soumis quelques-unes je pense. Et puis toi aussi, du coup ;-)
RépondreSupprimerBon dimanche sous la neige !