9 mars 2013

Bon appétit bien sûr !

Le Dîner, Herman KOCH

Un dîner de famille qui nous plonge dans les recoins les plus obscurs de l’être humain. À déguster saignant.  

Deux frères se retrouvent, avec leur épouse, pour un dîner dans un resto mondain et branché où obtenir une réservation tient de l’impossible. Rien de trop difficile pour Serge : annoncé comme le prochain premier ministre des Pays-Bas, son nom ouvre toutes les portes. Mais il en faudrait plus pour donner envie à Paul, le narrateur, de passer une soirée à la table de son frère : tout dans le comportement de Serge l’énerve, des platitudes de sa conversation (le dernier Woody Allen : un chef d’œuvre !) à sa manière de goûter le vin. Cependant, à mesure que le repas avance et que l’objet de la soirée se précise, d’autres tensions apparaissent et la digestion s’annonce difficile.
Mon billet sera court car il ne faut vraiment pas en dire davantage, voire même éviter de lire la quatrième de couverture. Ce roman joue sur la découverte de zones d’ombres de plus en plus effrayantes. Pas de coups de théâtre mais plutôt l’entrée progressive dans les pensées du narrateur et sur les raisons de sa présence au dîner.
Tout démarre sur le ton de la comédie de mœurs mais l’humour badin vire rapidement au cynisme et laisse entrevoir à certains moments un abyme de cruauté et de violence insoupçonnés. Je pensais lire une variation sur le même thème que celui du Dieu du carnage de Yasmina Réza, mais il n’en est rien. Pas de grand déballage à table : on plonge ici bien plus profondément dans les recoins les plus obscurs de l’humain.
L’écriture et la construction sont remarquables. Cependant, seul bémol, j’ai parfois eu l’impression que l’auteur s’était laissé emporter et qu’il n’hésitait pas à en rajouter une couche là où certains silences en auraient dit davantage.

Un livre découvert chez In Cold Blog.

Référence :
Herman KOCH, Le Dîner, traduit du néerlandais par Isabelle Rosselin, 10/18, 2013.

24 commentaires:

  1. J'ai moi aussi beaucoup aimé ce livre, sans bémol aucun d'ailleurs ! (enfin ça commence à faire un certain temps que je l'ai lu donc je ne peux qu'affirmer que le souvenir que j'en ai est sans bémol!!)

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    1. Vu tout ce qu'avais lu sur le roman, j'y allais avec beaucoup d'attentes, évidemment. Trop certainement.

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  2. Un roman que j'ai moi aussi beaucoup apprécié et qui pousse le lecteur à se questionner.

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    1. Juste: beaucoup de questions. C'est assez riche, en effet. Mais quel horrible tableau de la société.

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  3. Difficile d'oublier ce roman, lu depuis un certain temps pourtant mais il m'avait beaucoup impressionnée!

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    1. Vu tout ce que nous lisons, le critère de la mémoire est certainement un gage de qualité.

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  4. Tu as raison de ne pas en dire trop... Quel souvenir de lecture !

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    1. Comme dans les billets lus sur les autres blogs, il y a avait toujours cette envie d'en dire le moins possible, j'avais juste retenu qu'il s'agissait d'un dîner qui tournait mal.

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  5. Je ne l'ai pas lu, toujours un autre passe avant...
    Pour Le roman du mariage (lu les commentaires) on en a peu parlé sur les blogs, mais c'est quand même là que je l'ai découvert. (et si je veux l'acheter, il est au supermarché! mais j'attends la bibli, non mais!)

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    1. J'espère que les billets vont arriver car (je parle du "Roman du mariage"), plus j'y pense, plus je crois que c'est un grand roman. Une sorte d'"Éducation sentimentale" du vingtième siècle.

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  6. Il faudrait que je le lise un jour. On en dit tellement de bien.

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    1. Pour changer un peu des livres de cul(cul) pour desperate housewives?

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  7. La plongée progressive vers la "vérité" est rudement bien menée, on se retrouve à finir un autre livre que celui qu'on avait commencé. Par certains côtés, il m'a fait penser à "Il faut qu'on parle de Kévin" où les rapports familliaux se mettent aussi à jour avec une violence similaire, mais encore plus effrayante ... ( si, si, c'est possible !!!)

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  8. J'avais beaucoup apprécié ce roman cet été. Il vient de sortir en poche, ah là là je sens que mes élèves vont le lire l'an prochain !

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    1. J'ai pensé la même chose. Tu le donnerais à des sixièmes?

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  9. Une lecture très appréciée pour moi aussi, et assez glaçante, car finalement représentative d'une certaine idée "moderne" de l'éducation : dans un souci de privilégier la libre expression de l'enfant (ce qui est fondamentalement une bonne chose, évidemment), on dérape parfois en tombant dans l'excès et en occultant le fait que l'éducation, c'est aussi apprendre la responsabilisation et la reconnaissance de l'existence de l'autre...

    Et ton commentaire tombe à pic, Athalie, car je viens de terminer Il faut qu'on parle de Kévin, dont j'ai un peu de mal à me remettre. Je le trouve quand même beaucoup plus perturbant que Le dîner, dans lequel on se trouve face à des gamins gâtés pourris qui agissent mal par provocation et/ou désœuvrement, sans doute parce qu'on a mal su leur inculquer certains repères. Dans le roman de Shriver, le postulat de départ suppose une prédisposition innée au mal qui m'a un peu gêné..

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    1. La force du livre est finalement de ne pas porter de jugement sur ce qui se passe et sur les réactions des personnages (je continue à ne pas trop en dire...).

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  10. Un roman qui a toujours beaucoup de succès quand je le prête autour de moi.Content qu'il t'ait plu également, malgré le bémol

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    1. J'ai relu ton billet et tu avais aussi un bémol, il me semble.

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    2. Oui, mais apparemment pas le même que le tien

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  11. ah ce "dîner" qui me resta tellement sur l'estomac tant cette histoire m'a interpelée

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    1. Et pourtant, les assiettes étaient loin d'être pleines! ;-)

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  12. Un roman que j'ai vraiment beaucoup aimé ! Et qui fait froid dans le dos à la fin...

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